LA FETE DE SOUCCOT
Cette fête est également appelée « fête de notre joie ».
Elle porte ce nom parce qu’elle coïncide avec l’époque où rentre la récolte des champs. Cependant, il est un autre de ses aspects qui justifié ce nom.
Après les journées redoutables de Roch Hachana et de Kippour, elle offre l’occasion de se réjouir avec D.ieu et de trouver la voie qui mène vers Lui à tous ceux que ni l’austérité, ni le remords n’ont pu amener à la pénitence.
La première fois que la Torah mentionne le nom de Souccot c’est pour nous apprendre que Jacob s’était réconcilié avec son frère Esaû : celui-ci continua son chemin vers Séir, mais quant à Jacob, la Torah dit : « Et Jacob se dirigea vers Souccot. Il y bâtit une demeure, et, pour son bétail, il y bâtit des souccot: c’est pourquoi l’on appela cet endroit : Souccot » Genèse (33, 17).
La différence entre Jacob et Esaù est, en effet l’appréciation de la fête des Souccoth. Pour Esaù et le monde chrétien qu’il représente, la notion de joie religieuse, qui peut amener l’individu à se tourner vers D.ieu dans l’allégresse, n’existe pas. Il connaît, certes, l’approche de D.ieu dans la contrition ou dans l’union mystique. Il va « à Séir » discrète allusion au bouc émissaire, forme suprême de l’incarnation de l’homme, qui emmène ses fautes au loin. Le Juif, par contre, estime la mitsva de la joie à tel point qu’il en fait une fête, dont le but essentiel est de remercier D.ieu et de s’approcher de Lui dans la joie.
Jacob, ayant rencontré Esaù, ne resta pas avec lui. Il poussa plus avant, cherchant le lieu des Souccot. C’est aussi là raison pour laquelle D.ieu veut être seul avec Israël, pour célébrer le huitième jour de Souccot. Il cherche l’occasion de se trouver en joyeuse intimité avec son peuple.
On comprendra, alors, ce que veut dire le Prophète, quand il considère la fête de Souccot comme spécifiquement attribuée aux Juifs.
C’est la seule fête de notre calendrier juif que les non-Juifs n’aient pas imitée (Avoda Zara 3b). Mais le prophète Zacharie proclame qu’à la fin des temps, « Tel sera le péché des Egyptiens et les péchés de toutes les nations, qu’ils ne seront pas montés pour célébrer la fête de Souccot … et quiconque aura survécu parmi tous les peuples qui seront venus contre Jérusalem, devra s’y rendre, chaque année, pour se prosterner devant le Roi l’Eternel Cebaot, et pour célébrer la fête de Souccot ».
Les sacrifices offerts à Souccot concernent aussi bien le peuple d’Israël que les nations du monde. « Les taureaux de Souccot sont au nombre de soixante-dix, correspondant aux soixante-dix nations. Ils diminuent graduellement, c’est pour elles un signe de déclin (Soucca 55 b) et, au temps du Temple, ils les protégeaient contre les souffrances ».
Ainsi, après avoir obtenu à Yom Kippour le pardon pour lui-même, Israël demande, à Souccot, le pardon des péchés pour les nations du monde (Rachi). Car « quand D.ieu agrée les voies d’un homme, Il lui concilie même la faveur ses ennemis » (Proverbes 27).
Ces sacrifices expiatoires pour les nations du monde vont en diminuant, et ils ne comprennent que neuf taureaux, le septième jour, en témoignage de l’hostilité des nations envers Israël qui va s’affaiblissant avec le nombre des années. En effet, leur opposition à Israël, qui était irréductible au début, s’amenuise peu à peu dans le domaine politique et idéologique.
CHEMINI-ATSERET
Le huitième jour est le jour nommé Chemini-Atseret ce qui signifie arrêt, retenue. C’est le jour où il n’y a plus qu’un taureau, en face de sept agneaux.
Rachi écrit que l’explication du Midrach aggadique est la suivante : comme ils ont offert, à tous les jours de fête, des sacrifices correspondants aux soixante-dix nations, D.ieu leur dit, au moment du départ d’Israël: « Je vous retiens chez moi », comme un roi qui a invité ses enfants à un festin pour un certain nombre de jours. Lorsque le temps est venu de prendre congé, il dit : « Mes enfants, je vous prie restez chez moi un jour encore, votre départ m’est douloureux ».
Le jour de Chemini-Atseret est devenu en Israël un jour de joie exubérante, rehaussé par la clôture de la lecture de la Torah. Les signes de la fête ont disparu, car il n’existe plus de soucca, ni rien des « quatre espèces », ni des sacrifices. Il n’existe plus que la joie, entre le peuple d’Israël et son D.ieu.
Lorsque nous venons nous présenter à Souccot avec un bouquet des « quatre espèces », il nous semble que nous venons devant D.ieu avec les palmes de la victoire.
Une parabole illustre cette idée : deux parties adverses s’accusent devant une Cour de Justice, et personne ne peut savoir qui a gagné.
Cependant, dans notre cas, nous pouvons dire qui l’a emporté : c’est celui qui tient entre ses mains le palmier de la victoire. A Roch Hachana, le peuple d’Israël et les nations du monde paraissent devant la Cour céleste, comme deux adversaires. Nous savons qui est le vainqueur, quand nous voyons la marche triomphale de celui qui porte le loulav dans sa main droite.
LES QUATRE ESPECES ET LEUR SYMBOLISME
Nos sages nous ont donné de nombreuses explications du symbolisme du bouquet des « quatre espèces ». Pour les uns, elles représentent le règne entier des arbres. Le saule n’a ni fruits comestibles, ni parfum. Le myrte est parfumé, mais ne porte pas de fruits comestibles. Le palmier porte un fruit délicieux, mais qui n’est pas parfumé. L’etrog enfin, non seulement est un fruit exquis, mais l’arbre qui le porte est parfumé de la racine jusqu’aux feuilles et aux fruits. Il est le roi des arbres. C’est avec ce bouquet des quatre espèces symboliques de tous les produits végétaux de son pays, que le peuple d’Israël se présente devant D.ieu, pour Lui dire sa reconnaissance de lui avoir donné en héritage un pays si beau, si fécond, et d’avoir béni le travail de ses mains.
On ajoute une prière, celle de recevoir à l’avenir la faveur de la protection divine dans tous les domaines de l’activité humaine. Selon la coutume, on agite alors le loulav vers les quatre directions et vers le haut et le bas.
Nos Sages ont vu dans le bouquet du loulav l’image de l’unité d’Israël. Dans leur esprit, le parfum représente le savoir (de la Torah) et les fruits, les bonnes actions. Le saule, dépourvu de fruits comestibles et de parfum, symbolise la masse sans savoir et sans bonnes actions. Le myrte, parfumé, dépourvu de fruits comestibles, est le symbole des personnes dotées de savoir mais se désintéressant des bonnes actions. Le palmier, dénué de parfum, porte un fruit délicieux, il rappelle les personnes sans savoir qui se consacrent aux bonnes actions. L’etrog enfin, supérieur par son parfum et par un fruit exquis, figure l’élite d’Israël, illuminée par le savoir, ennoblie par les bonnes actions. Que ces quatre groupes loin de se désagréger en classes séparées, s’unissent par les liens de la solidarité en un seul corps national, afin que, dans un sentiment de fraternité, l’élite, par ses vertus, comble les lacunes des couches inférieures du peuple.
Na’hmanide cite l’explication suivante : L’etrog est le fruit défendu du Paradis, car il a toutes les qualités qui lui sont attribuées.
« La femme vit que l’arbre était bon comme nourriture, qu’il était attrayant à la vue et précieux pour l’intelligence, elle cueillit de son fruit et en mangea… ».
C’est lui seul qui était l’objet du péché. Cependant, l’adage bien connu que l’on ne peut être à la fois juge et partie n’intervient pas ici, car, sitôt que ce fruit doré se trouve allié aux trois autres espèces, ils sont jugés ensemble pour le meilleur et pour le pire. Encore une fois, c’est l’idée de l’unité que la Torah veut nous enseigner ici.
LA SOUCCA ET LES HÔTES D’HONNEUR
Le Zohar fait remarquer que la Torah emploie une double expression pour nous enseigner l’obligation de demeurer dans les tentes. Une première fois « Vous demeurerez dans les tentes sept jours ». Cela se rapporte aux hôtes d’honneur, qu’on appelle les ouchpizine. La deuxième fois, l’ordre se rapporte à tous les indigènes juifs.
En effet, chaque jour de Souccot, nous recevons symboliquement à la soucca un des sept hôtes d’honneur, lesquels se succédent dans l’ordre suivant : Abraham, Isaac, Jacob, Moïse, Aharon Joseph et David. Ce sont ces héros de l’esprit qui nous ont enseigné dans quel esprit devaient se succéder les sept millénaires de notre Histoire.
Chaque jour, nous faisons honneur à l’un de ceux-ci : Abraham, pour son enseignement de l’amour de D.ieu, à Isaac pour sa discipline à l’égard de la Loi, à Jacob, pour ses vertus de Père de famille dont il fit preuve, à Moïse, pour avoir organisé la nation, et à Aaron, pour le sacerdoce qu’il a exalté en nous, à Joseph pour la pureté des mœurs et pour la vigilance vis-à-vis des nations dont il nous montre l’exemple. Enfin, le septième jour, nous évoquons l’esprit de David, roi d’Israël, en qui nous voyons l’ancêtre du Messie, fondateur du futur royaume de D.ieu. Ce sont les sept hôtes d’honneur qui ont formé l’esprit qui nous dirige à travers les sept millénaires de notre Histoire.