« Alors ils s’approchèrent de Moïse et dirent : “Nous construirons ici des parcs à brebis pour notre bétail et des villes pour nos enfants” » ( Nombres 32, 16).
Rachi commente : « Ils se souciaient plus de leur argent que de leurs fils et leurs filles car ils ont mentionné leur bétail avant leurs enfants. Moïse leur dit : « Ne vous conduisez pas ainsi. Occupez-vous d’abord de l’essentiel et que l’accessoire vienne en seconde place. Construisez d’abord des villes pour vos enfants et ensuite seulement des parcs pour votre bétail » (voir verset 24).
Le midrach ajoute : « C’est ce qui est écrit (Ecclésiaste 10, 2) : “Le sage a le cœur à droite [il s’agit de Moïse] et le cœur du sot est à sa gauche [ce sont les membres des tribus de Gad et Reouven]. »
Il est dit, en effet, à propos de la Torah : « Elle porte la longévité à sa droite, et en sa gauche, la richesse et l’honneur » (Proverbes 3, 16). La gauche représente les biens matériels. Il est à remarquer dans ce verset que dans l’alphabet, les lettres du mot cœur/ lèv placées à la droite des lettres lamèd et vèth sont le caf et le aleph et forment le mot akh / seulement . Akh désigne une restriction (mi’out ). Les lettres situées à leur gauche sont le mèm et le guimel qui forment le mot gam/aussi, terme employé pour ajouter (lérabot). Est-ce à dire que lorsque le cœur est à droite, il tend à réduire la recherche de biens matériels et quant il est à gauche, il aspire à en accumuler toujours davantage ?
Chaque père de famille doit se poser la question. Lui faut-il concentrer ses efforts sur son gagne-pain ou sur l’éducation de ses enfants ? Faut-il en premier lieu assurer leur avenir professionnel ou leur formation solide en tant que Juifs ? La Torah ne dit certes pas qu’il faut négliger le gagne-pain mais l’important est de faire la juste part des choses : les enfants et leur réussite spirituelle ont priorité sur toutes les préoccupations d’ordre matériel.
Comment les hommes de la tribu de Gad et Reouven ont-ils pu commettre une telle erreur ? Peut-être pensaient-ils que leur long séjour dans le désert où ils étaient nourris miraculeusement de manne prenait fin et que cette époque d’aide surnaturelle était révolue ? La responsabilité du gagne-pain incomberait désormais à l’homme et devait donc primer sur ses autres préoccupations.
Dans sa réponse, Moïse leur a signifié que telle n’était pas la conception de la Torah. Même en temps normal, c’est D.ieu et Lui seul qui accorde à l’homme sa nourriture, exactement comme à l’époque de la manne. Certes, l’homme « doit manger son pain à la sueur de son front » c’est-à-dire peiner et fournir des efforts (dans le travail… et dans la prière) car c’est ainsi que D. l’a décrété pour réparer la faute d’Adam. Cependant, notre gagne-pain, lui, est fixé par le Tout-puissant depuis Roch Hachana.
Par conséquent, comme il est uniquement dans les mains de D.ieu, le véritable croyant ne doit pas considérer son gagne-pain comme le premier de ses soucis. Il aura l’esprit libre pour se préoccuper d’abord de son « bien-être » spirituel et de celui de ses enfants, au présent et dans l’avenir.
Le message que Moïse a transmis aux premières tribus qui ont commencé à s’installer sur leurs terres est clair : l’important, dans un foyer, est de ne pas confondre l’essentiel et l’accessoire.