L’alliance entre les morceaux (Genèse 15) à laquelle D.ieu convie Avraham n’est, d’après l’ensemble des commentateurs, que la préfiguration de l’histoire du peuple juif.
La génisse, la chèvre et le bélier qu’Avraham découpe en leur milieu correspondent aux grands empires qui s’attaqueront tour à tour à la Communauté d’Israël et qui s’effondreront les uns après les autres. “Et l’oiseau, il ne le fendit point”. La colombe, symbole d’Israël, ne disparaît pas. Elle résiste à toutes les épreuves de l’histoire et le peuple juif se perpétue, intact, à travers les âges. Cette vision extraordinaire qui s’offre à Avraham n’a pas seulement une portée historique, c’est toute une conception philosophique du monde que D.ieu révèle à notre patriarche.
La destinée d’Israël se place entièrement en dehors des notions de force matérielle et numérique. Le Tout-Puissant dit, en effet, à Avraham (Rachi sur Genese15, 5) : « Sors des conceptions [astrologiques] qui étaient les tiennes jusqu’à présent. Tu considérais, jusqu’à maintenant, que tu ne pourrais pas avoir de descendant. Effectivement, Abram n’aura pas de fils mais Avraham engendrera… »
Pourquoi ceci sera-t-il possible précisément par l’adjonction de la lettre « Hé » ? Il est écrit, à ce propos, dans Genèse 2, 4 : Behibaream = Be « Hé » beraam – C’est avec un « Hé » qu ’11 les créa. Le « Hé » est la lettre qui se prononce avec le moins d’effort comme si le Saint béni soit-il avait voulu montrer aux êtres humains que Sa Toute Puissance est telle que la Création de notre Univers, aux dimensions et aux structures infinies, ne Lui a demandé absolument aucune peine. Tel est le signe dont seront porteurs les descendants d’Avraham : s’efforcer de vivre en tenant compte le moins possible des notions de force numérique, physique, matérielle ; c’est avant tout s’affirmer le témoin permanent du fait que c’est D.ieu et D.ieu seul qui, dans Son infinie grandeur, régit partout et toujours le développement de l’histoire du monde. Appartenir à la minorité spirituelle que représente le peuple juif, c’est réunir en ses mains des atouts décisifs pour approfondir sa Foi, pour reconnaître véritablement son Créateur.
Cependant, D.ieu a voulu assurer à Son peuple un autre avantage en concluant cette Alliance avec Avraham. Orienter l’histoire d’un peuple qui ne représentera, selon les valeurs des nations, qu’une minorité numérique quasi dérisoire, c’est assurer d’emblée une objectivité totale, un caractère de vérité absolue au message que ce Peuple apportera à l’humanité.
Si les nations, soucieuses de préserver leur influence et leur position de force, font fi de tout souci de vérité ou de justice pour ne chercher à préserver que leurs intérêts propres, certaines autorités spirituelles en font tout autant. Voulant conserver, par opportunisme politique, leur influence dans telle ou telle autre partie du monde, elles ont couvert, par leur silence complice, les crimes les plus atroces perpétrés contre l’humanité. Le peuple juif, “le moins nombreux parmi les peuples” s’est dégagé de ces contingences. La voix qu’il peut élever pour faire entendre la Vérité est une voix pure.
C’est cette voix décisive que l’Humanité, cherchant au fond d’elle-même cette Vérité, attend pour trouver son chemin. Au temps de la rédemption, lorsque cette Vérité sera révélée aux yeux de tous, Israël pourra alors devenir « nombreux comme les étoiles du Ciel ».
(adapté à partir de Imré Cohen )