La mitsva de la ‘hala
1. Quelle l’origine de la mitsva de la ‘hala ?
La Torah relate ainsi la prescription de prélever la ‘hala : «D.ieu parla à Moïse en ces termes: Parle aux enfants d’Israël et dis leur: A votre arrivée dans le pays où je vous conduirai, lorsque vous mangerez du pain de la contrée, vous en prélèverez un tribut à D.ieu. Comme prémices de votre pâte, vous prélèverez la ‘hala à l’instar du tribut de la grange, ainsi vous la prélèverez. Des prémices de votre pâte vous ferez hommage à D.ieu dans vos générations futures [1].»
La ‘hala ayant le même statut que la térouma [2], elle revient au Cohen [3].
A notre époque étant tous impurs [4], on prélève la ‘hala et on la brûle parce qu’elle est impure [5].
En cas d’impossibilité de la brûler, on peut l’envelopper de deux épaisseurs de papier ou de plastique et la déposer dans une poubelle.
2. La mitsva de la ‘hala est-elle à notre époque une mitsva d’ordre rabbinique ou de la Torah ?
Nos Sages déduisent de l’expression employée « A votre arrivée dans le pays » que cette mitsva ne nous incombe que lorsque la majorité des juifs habitent en Israël. C’est ce que nous enseigne le Choul’hane ‘Aroukh :
»La mitsva de la Torah ne nous incombe que dans le pays d’Israël à condition que la totalité ou la majorité des juifs résident en Israël. Ainsi à notre époque, même du temps d’Ezra] après le retour d’une partie des exilés de Babel] en Israël la mitsva de la ‘hala n’était que d’ordre rabbinique [6]. »
3. En dehors d’Israël, y a-t-il une obligation de prélever la ‘hala ?
L’obligation de prélever la ‘hala en dehors d’Israël est strictement d’ordre rabbinique, afin que cette mitsva ne tombe pas dans l’oubli auprès des juifs de l’exil [7].
Conditions requises pour prélever la ‘hala
1. Quantité de farine
Quelle est la quantité de farine minimale requise pour prélever la ‘hala avec bénédiction ?
Maïmonide ainsi que l’auteur du Choul’hane ‘Aroukh mentionnent un poids équivalent à 520 dhrames.
Dans son livre[8] le Rav ‘Hayim Naé après avoir procédé à plusieurs mesures dut conclure que le poids correspondant à cette mesure était de 520×3.2= 1.666 kg de farine [9]. Dans le même chapitre, l’auteur relate l’usage des communautés ashkénazes anciennes de prélever la ‘hala à partir de 1.200kg.
Il recommandé donc de prélever sans bénédiction entre 1.2kg et 1.666 kg de farine.
Il est à noter que certaines communautés ashkénazes se fondent sur le ‘Hazon Ich et requièrent une quantité de farine de 2.250 kg pour réciter la bénédiction.
Selon l’avis du rav Ovadia Yossef zatsal on peut réciter la bénédiction à partir de 1.560 kg de farine [10].
Conseils pratiques:
Evitez si possible de pétrir une quantité de farine comprise entre 1 et 2 kg. Pour 1 kg de farine la pâte obtenue est toujours dispensée de ‘hala tant qu’elle n’est pas associée à d’autres pâtes.
Pour une quantité de 2 kg de farine, la majorité des décisionnaires pensent qu’il faut prélever la ‘hala avec bénédiction.
****A PARTIR DE 1,2 Kg DE FARINE PRELEVEZ LA ‘HALA SANS BENEDICTION
****A PARTIR DE 1.660 Kg DE FARINE PRELEVEZ LA ‘HALA AVEC BENEDICTION
2. Composition de la pâte: farine et liquide
La farine doit être à base de l’une ou d’une association des 5 céréales suivantes: le blé, l’orge, l’épeautre, le seigle ou l’avoine.
Le liquide utilisé pour pétrir la pâte doit appartenir à la catégorie des liquides suivants: le vin, le miel, l’huile, le lait, la rosée, l’eau.
Dans quel cas pourra t-on prélever la ‘hala avec bénédiction ?
On pourra prélever la ‘hala avec bénédiction si on pétrit une pâte composée avec une farine à base d’une ou de plusieurs des 5 céréales, et un des liquides mentionnés (2) plus haut.
EXCEPTION : Une pâte composée de farines de riz et de blé peut être imposable de ‘hala si elle a le goût d’une pâte de blé, même si elle est composée majoritairement de riz [11].
Dans quel cas prélèvera t-on la ‘hala sans bénédiction ?
Si on pétrit une pâte avec des œufs ou du pur jus de fruit (sans ajouter de l’eau), on prélèvera la ‘hala sans bénédiction même si la quantité de farine requise est présente dans le mélange [12].
3. Mode de cuisson
La pâte obtenue devra être cuite au four ou sur une poêle, sans liquide.
Si la pâte épaisse est cuite dans l’eau ou frite dans l’huile profonde, devra t-on prélever la ‘hala ?
Si une pâte même de consistance épaisse est préparée dans l’intention d’être frite ou cuite dans l’eau, elle est dispensée de ‘hala car elle n’a pas le statut de pain [13].
Dans le cas ou une partie de cette même pâte est cuite au four, on pourra prélever la ‘hala avec bénédiction si la quantité de farine utilisée au départ est requise pour l’imposition de la ‘hala.
A noter que si la pâte est liquide [14] et frite dans l’huile profonde, elle est dispensée de ‘hala, selon tous les avis (beignets).
Une pâte pétrie avec du lait sans adjonction d’eau, est elle imposée de ‘hala ?
Elle est imposée de ‘hala avec bénédiction [15].
4. Cas particuliers: Pâte que l’on prévoit de partager.
Une personne pétrit une pâte à partir de 2kg de farine mais prévoit de partager la pâte en deux parties égales avant cuisson, et de donner à sa fille 1 kg de pâte et d’enfourner 1kg, doit-elle prélever la ‘hala ?
L’intention première de partager cette pâte en deux, revient à pétrir individuellement deux pâtes de 1kg chacune. Cette pâte est donc dispensée de ‘hala.
Une personne pétrit une pâte à partir de 2kg de farine et la fait cuire au four avec l’intention de partager les pains cuits avec sa fille. Doit-elle prélever la ‘hala sur cette pâte ?
Elle doit prélever la ‘hala avec bénédiction du fait que la quantité imposable de ‘hala est enfournée intégralement par la même personne.
Association de pâtes pétries
Dans quel cas peut-on associer plusieurs pâtes pour obtenir la quantité requise pour prélever la ‘hala ?
Rappelons que seuls 5 types de céréales sont imposables de ‘hala: le blé, l’orge, l’épeautre, le seigle et l’avoine.
De manière générale, le principe de l’association de pâtes consiste à considérer les pâtes comme une seule entité. Ce qui signifie que deux pâtes qui sont fondamentalement différentes ne peuvent pas s’associer même en les collant.
Plusieurs conditions sont à remplir :
1) Les espèces doivent être susceptibles de s’associer:
Si on pétrit deux pâtes distinctes de 1kg avec deux des cinq céréales, elles peuvent s’associer, uniquement dans l’ordre suivant:
Le blé n’est associable qu’avec l’épeautre.
L’épeautre est associable avec toutes les autres.
L’orge est associable avec toutes les autres céréales sauf avec le blé.
Le seigle n’est associable qu’avec l’orge et l’épeautre.
L’avoine n’est associable qu’avec l’orge et l’épeautre[16].
2) L’association ne peut se faire que dans le cas où les pâtes sont de même composition ou de composition susceptibles de s’associer:
Une pâte salée et une pâte sucrée ne peuvent être associées même si elles sont faites à partir de la même céréale [17].
3) L’association ne peut se faire que dans le cas où les deux pâtes appartiennent à la même personne [18].
Comment peut se faire l’association ?
L’association peut se faire de deux manières:
1) La morsure des pâtes ou néchikha
Deux pâtes posées côte à côte peuvent s’associer en se collant.de façon à ce qu’en soulevant une des pâtes, l’autre se tire un peu, comme si elle ‘mordait’ l’autre [19] .
2) L’association par un récipient, ou panier ou serviette recouvrant entièrement les pâtes ou tsirouf sal [20]
Le tsirouf sal permet d’associer deux pâtes entreposées dans un même récipient, à une seule condition : les deux pâtes doivent être de même composition ou de composition susceptible de s’associer c’est à dire qu’il n’y ait aucune contre-indication à les mélanger complètement. Mais si leurs compositions sont différentes, elles ne peuvent pas s’associer pour être imposées de ‘hala car généralement on ne désire pas qu’elles se mélangent.
Les pâtes ou les pains à associer doivent être déposés dans un récipient dont les parois recouvrent leur contenant.
Remarques :
1) Deux pâtes de blé identiques, l’une épicée et l’autre non épicée ne peuvent s’associer par aucun moyen puisqu’elles ne sont pas susceptibles de s’associer en une même pâte [21].
2) Deux pâtes, l’une de farine complète et l’autre de farine blanche, ne peuvent s’associer par aucun moyen puisqu’elles ne sont pas susceptibles de s’associer en une même pâte [22].
Note importante :
Le tsirouf sal permet d’associer:
- les pâtes pétries avant cuisson
- les pains cuits dans le cas où on aurait oublié de prélever la ‘hala au stade de la pâte
- les biscuits faits à partir d’une pâte liquide dont l’obligation de ‘hala n’intervient qu’après cuisson pour une quantité de farine imposable
- les matsots après cuisson puisqu’a priori on pétrit pendant Pessa’h ou même la veille de Pessa’h, une pâte inférieure à celle imposable de ‘hala.
Bénédiction et prélèvement
Avant de prélever la pâte on récite la bénédiction suivante:
בָּרוּךְ/ אַתָּה/ ה’ / אֱלֹהֵינוּ/ מֶֽלֶך/ הָעוֹלָם / אֲשֶר / קִדְּשָנוּ
/kidéchanou/ achér / ha-‘olam /mélékh / élohénou / Adonaï / ata /baroukh
בְּמִצְוֹתָיו / וִצִוָּנוּ / לְהַפְרִישׁ / חַלָּה / תְּרוּמָה /
/ térouma / ‘hala / léhafrich / vétsivanou/ bémitsvotav
»Tu es source de bénédictions, Hachem, notre D.ieu, Roi de l’Univers, Qui nous as sanctifiés par Ses commandements, et nous as commandés de prélever la ‘hala ».
Après le prélèvement on dit:
הַרֵי זוּ חַלָּה
haré zou ‘hala
« Ceci est la ‘hala »
Quelle quantité de ‘hala doit-on prélever ?
Selon la Torah, une quantité infime de ‘hala peut suffire comme tribut pour une très grande quantité de farine.
A l’époque ou la ‘hala était consommée par le Cohen, le boulanger devait prélever 1/48 de la pâte, et le particulier devait en prélever 1/24 sauf si la pâte devenait impure involontairement, auquel cas il devait prélever 1/48 [23].
A notre époque où il n’y a pas de pâte pure à cause de l’impureté générale (toum-at met), on prélève 1/48 de la pâte selon Rambam et l’auteur du Choul’hane ‘Aroukh et on la brûle.
Les décisionnaires divergent sur la quantité de ‘hala a prélever actuellement.
Selon certains il faut prélever environ 30g, mais selon de nombreux décisionnaires séfarades notamment le rav ‘Hida [24], le Ben Ich ‘Haï [25], et le rav Ovadia Yossef zatsal, une quantité infime de pâte suffit.
Que faire de la ‘hala ?
Rappel important
1) A l’origine la ‘hala était prélevée et donnée au Cohen. L’absence de moyens de purification de l’impureté (toum-at met) fait que nous sommes impurs et le contact de la ‘hala la rend impure.
2) La ‘hala a le statut de térouma impure, il ne faut pas qu’elle entre en contact direct avec une plaque du four ou une grille de la cuisinière, car la chaleur provoquera l’absorption de térouma qui reste interdite à la consommation.
3) La ‘hala dès son prélèvement doit être mise de coté, pour éviter qu’elle ne se mélange à la pâte.
** S’il est possible de la brûler, on donnera priorité à cette solution, en prenant certaines précautions.
1) ne pas la brûler dans le four sur une plaque
2) ne pas la brûler sur les grilles de la cuisinière
3) on pourra la brûler sur le brûleur (gaz) directement
4) on pourra l’envelopper de deux feuilles d’aluminium et la brûler dans le four (après avoir terminé la cuisson du pain)
5) de préférence on la brûlera sur le gaz ou sur une plaque électrique dans un boite à conserve
Dans le cas ou le mélange pâte liquide ne contient que des jus de fruits ou des oeufs sans adjonction d’eau, il faudra humecter la ‘hala avant de la brûler.
** S’il est impossible de la brûler, on l’enveloppera d’une couche double de plastique ou d’aluminium et on la déposera dans la poubelle.
Chabbat Chalom !
Ra Yaacov Amsellem
[2] Prélèvement sur les céréales.
[3] Choul’hane ‘Aroukh Yoré Déa 322, 1
[4] Le procede de purification avec les cendres de la vache rousse n’étant pas actuel, nous sommes tous considérés comme impurs au degré le plus extrême ou tamé mét.
[5] Maimonide Bicourim Chap.5, 9
[6] Yoré Dé’a chap. 322, 2
[8] Chi’ouré Torah vol.1 p. 168
[9] Ce poids est obtenu à partir de l’unité du drhamme équivalent à 3.2g (520×3.2).
[10] Ce poids est obtenu à partir de l’unité du drhamme équivalent à 3 g (520×3). Le Rav Ovadia Yossef zatsal se base sur les travaux du Rav Hadar Yéhouda Margoulin parus en Adar 5758 (1998) qui prouvent que dans tous les musées visités contenant des pièces de tous les temps y compris celle de Maïmonide, la pièce la plus grande ne dépassait pas 3 g.
[11] Choul’hane ‘Aroukh Yoré Déa 324, 9
[12] Halikhot ‘Olam vol. 5 p. 225
[13] Halikhot ‘Olam vol. 5 p. 224
Notons que certains décisionnaires préconisent de prélever la ‘hala sans bénédiction dans ce cas.
[14] Une pâte est appelée liquide si elle s’étale sur une surface plane.
[15] Halikhot ‘Olam vol. 5 p. 225
Le lait ayant le même statut que l’eau, l’huile, le miel, le vin, la ‘hala doit être prélevée avec bénédiction.
[16] Choul’hane ‘Aroukh Yoré Dé‘a 324, 2
[23] Choul’hane ‘Aroukh Yoré Dé‘a 322, 1
[24] Birqué Yossef 322, 2
Chioré berakha 322, 1