Ceci est l’histoire de Noa’h. Noa’h fut un homme juste, parfait dans ses générations: il marchait avec D.ieu.
(Genèse 6, 9)
»Parfait dans ses générations »: Celles qui précédèrent et celles qui suivirent le déluge. Cette indication du texte est-elle restrictive de l’éloge fait à Noa’h ?
Nos Maîtres en ont discuté et Rachi rapporte l’opinion favorable d’après laquelle Noa’h fut un juste même à son époque dépravée et l’opinion péjorative qui considère Noa’h comme un juste, mais relativement à son époque immorale. Cependant, les deux opinions peuvent être valables toutes les deux.
Le combat que Noa’h eut à livrer peut, en effet, laisser quelques empreintes sur la force de caractère. Mais une conduite morale et irréprochable à une telle époque pèse bien plus lourd dans la balance divine que celle, même plus parfaite réalisée en des meilleures conditions. L’expression : Noa’h marchait avec D.ieu, qui complète la caractéristique, sous-entend également une légère critique que Rachi formule ainsi: «Tandis que pour Abraham on dit: Marche devant Moi (16, 1). Noa’h avait besoin d’un appui pour le soutenir, Abraham était assez fort et marchait dans sa piété de lui-même ».
La tradition se demande pourquoi Noa’h, qui fut pourtant couvert d’éloges par la Torah et qui inaugura un nouveau monde, ne put devenir un Abraham et être, à partir de la renaissance de l’humanité, le grand prophète de la croyance monothéiste. Les observations précédentes ont déjà répondu en partie à cette question. Mais les Sages remarquent, en outre, que Noa’h ne sut pas lutter avec une énergie suffisante contre le courant d’immoralité de son époque. Il ne sut pas convaincre ses contemporains, comme Abraham sut le faire. Il n’intercéda pas auprès de l’Eternel en faveur de sa génération comme Abraham le fit en faveur des habitants de Sodome. Enfin, il accepta d’être sauvé seul de la mort, lui et sa famille, tandis que Moïse, entendant l’Eternel menacer Israël d’anéantissement pour faire de lui « un grand peuple », se récria immédiatement : « O ! Pardonne leur faute ! Sinon, efface-moi du livre que tu as écrit» (Exode 32, 32). Il ne voulut en aucun cas survivre à son peuple et préféra partager son sort (Midrach et Zohar). Bref, Noa’h était l’homme qui s’enferma dans son « arche », demeurant un juste pour lui et les siens, laissant les autres à leur destin.
Certes, répondent ceux de « nos Sages qui jugent Noa’h du côté favorable » (Rachi), Noa’h ne cessa pendant les cent vingt ans que dura la construction de l’Arche de réprimander, d’avertir et d’éclairer ses contemporains (Rachi 6, 14), en vue de les inciter à la pénitence. Il ne craignit pas d’essuyer leurs sarcasmes, leurs propos malveillants, menaçants et injurieux. Mais il s’imposa néanmoins une certaine réserve à leur égard et jugea opportun de garder ses distances afin de ne pas risquer de subir lui-même une influence néfaste dans sa fidélité à D.ieu. Il alla même jusqu’à s’abstenir de fonder une famille avant l’âge de 500 ans, alors que tous ses ancêtres et contemporains étaient devenus pères de famille beaucoup plus tôt. Il craignait de mettre au monde des enfants au milieu d’une société complètement pervertie et de ne pas avoir la possibilité de leur donner une éducation morale et saine. Ce ne fut que 20 ans après la proclamation de l’anéantissement définitif et après s’être exercé pendant 500 ans à « marcher avec D.ieu », seul et sans famille, qu’il eut le courage d’être père, après que Dieu lui eut fait comprendre que la perpétuation de la race humaine lui incomberait.
Ainsi, quelles que soient les critiques qui lui furent adressées, la Torah, en décernant à Noa’h le titre d’honneur de tsadik, approuve la conduite de cet homme, qui, exposé à la pire catastrophe que l’humanité ait connue, fut trouvé digne de sauver le genre humain. On a reproché à Noa’h de n’avoir pas imploré D.ieu de sauver sa génération comme le fit Abraham à propos des habitants de Sodome, mais il trouve sa justification dans le fait que le nombre des justes de son époque n’atteignait pas la dizaine. Noa’h et sa famille qui survécurent dans l’arche n’étaient que huit personnes. Or tout comme Abraham, Noa’h savait que le minimum de dix justes est requis en pareil cas. (texte adapté a partir de la Voix de la Torah )
A nous de choisir notre modèle Noa’h ou Abraham. Dans l’impossibilité de le faire pour des raisons diverses, soutenons activement ceux qui ont choisi le modèle d’ Abraham en diffusant le message universel de la Torah.