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Paroles de Torah sur la section lue chaque semaine

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PARACHAT VAYECHEV 5780

YOSSEF OU LE ROLE D’ISRAEL DANS L’EXIL

 Nous abordons ce Chabbat l’histoire de Yossef qui va occuper presque quatre sections de la Torah. La suite chronologique de la vie des Patriarches tranche par rapport au récit de leur vie que nous avons lu précédemment.

En effet, jusqu’à présent, Hachem est apparu pour intervenir directement dans les destinées des hommes qui sont à l’origine de notre histoire : Adam, Noa’h, Avraham, Yits’haq et Ya’akov auxquels II s’est manifesté ouvertement.

Pour Yossef, il n’en sera pas de même. Les événements qui jalonnent sa destinée peu commune, semblent d’ordre absolument naturel, humain. L’amour exagéré de son père envers lui, la jalousie de ses frères, les tentatives de séduction de la femme de Putiphar, la résistance de Yossef, son emprisonnement et son avènement au pouvoir en Egypte représentent une chaîne de circonstances qui, à première vue, ne relèvent pas du miracle.

Et pourtant, Yossef n’oublie pas un instant qu’à travers tous ces événements, tous ces bouleversements, c’est toujours Hachem qui, de façon cachée, dirige le cours de l’histoire. Dans ces sections, la présence du Saint béni soit-Il ne se révèle pas directement par des miracles et II ne s’adresse pas non plus à l’homme face à face.

Mais dans l’entourage de Yossef, la Providence se percevait dans la vie de tous les jours même par les non-Juifs car il proclamait à chaque instant « hacol bidey chamaïm » tout est dans les mains de D.ieu. « Et son maître [Putiphar] vit que D.ieu était avec [Yossef] et qu’il lui faisait réussir tout ce qu’il entreprenait » (39, 3). Rachi explique : « Le nom de D.ieu était fréquent dans sa bouche ».

Sans relâche, Yossef soulignait et rappelait que tout dépend de l’intervention divine. Lorsque Pharaon lui dit : « J’ai entendu de toi que tu savais interpréter les rêves !» (41, 15), il répondit : « Ce n’est pas moi ! C’est D.ieu qui répondra pour le bien-être de Pharaon ! » (41, 16).

Yossef n’aurait-il pas pu se taire dans l’espoir que, grâce à son intelligence, on le libérerait de son cachot ? Lorsqu’il se dévoila à ses frères, il leur répéta à plusieurs reprises : « Ne soyez pas en colère contre vous-mêmes de m’avoir vendu ici car c’est pour vous nourrir que D.ieu m’a envoyé [en Egypte] avant vous » (45, 5) ou encore : « Ce n’est pas vous qui m’avez envoyé ici mais D. » (45, 8). Démontrer l’intervention divine dans les choses les plus naturelles, tel est le rôle que Yossef s’est donné en Egypte. Peut-être pour la même raison fut-il puni de deux ans de prison supplémentaires : solliciter l’aide de l’échanson représentait un petit écart par rapport à sa ligne de conduite.

Yossef en Egypte, c’est l’histoire du peuple juif en exil. Lorsque Israël était sur sa terre, l’existence de D.ieu se manifestait ouvertement dans le Temple. Dans l’obscurité de l’exil, son rôle non moins sublime est de démontrer au monde, à l’instar de Yossef, la réalité de la Providence cachée, le doigt de D.ieu à travers les événements apparemment naturels de l’histoire.

Du reste, c’est dans le même ordre d’idées qu’à Hanoucca nous allumons huit bougies et non pas sept. La quantité d’huile découverte dans le Temple n’était-elle pas suffisante pour le premier jour ? Où était donc le miracle du premier jour ? En réalité, le naturel n’est pas moins extraordinaire que le surnaturel. La première lumière des bougies doit être disposée sur le même plan que les sept autres. Ceci nous rappelle que tout ce qui est « habituel et normal » dépend, dans la même mesure que le miracle, de l’intervention de D.ieu:

Un autre élément précurseur de notre histoire peut se dégager du récit de Yossef. En effet, si l’on considère chaque étape de sa vie, aucune n’est une suite logique de l’autre :

  1. Tout d’abord, Yossef étant le préféré de son père, un bel avenir et un important héritage lui semblent assurés.
  2. Pourtant, il se retrouve au fond d’un puits rempli de scorpions, c’est certainement la fin…
  3. Cependant, il devient l’homme de confiance et l’Intendant général du ministre égyptien Putiphar, une situation d’avenir !
  4. Soudain, il est jeté au cachot à la suite d’une terrible diffamation et il y finira certainement ses jours.
  5. Mais voilà que, du jour au lendemain, Yossef devient le vice-roi tout puissant de l’Egypte.

Par cette suite d’épisodes tout à fait inattendus, la Torah nous montre qu’au fond, ce ne sont pas les éléments sociologiques, politiques, économiques qui déterminent l’Histoire (et, en particulier, celle du peuple juif). Ce sont, au contraire, des facteurs imprévisibles, apparemment fortuits, dépassant le domaine humain qui tracent notre parcours.

C’est peut-être l’un des points reliant notre paracha avec ‘Hanoucca. Sous la domination d’Antiochus, les Juifs ont vécu l’une des plus sombres époques de leur histoire. Tout historien aurait prédit que la suite logique des événements serait la disparition pure et simple du peuple juif. Or, c’est à ce moment précis que le royaume de Judée renaquit et, plus fort que jamais, il retrouva son indépendance. Lorsqu’il n’y a presque plus d’huile, le miracle se produit et la lumière jaillit !

L’histoire d’Israël ressemble à une suite d’illogismes, à la répétition continuelle de l’épisode de Yossef et de ‘Hanoucca. La meilleure preuve en est que nous sommes toujours là en tant que Juifs. Si seuls les événements historiques nous avaient régi, nous ne serions pas ici aujourd’hui.

Parfois, nous avons l’impression d’avoir touché le fond du puits et il nous semble que l’huile va manquer. Toutefois, forts de l’expérience de notre histoire exceptionnelle, nous savons que notre situation au plus bas de l’échelle constitue le prélude au redressement du Judaïsme.

Il nous incombe à tous de participer de toutes nos forces à ce relèvement qui nous mènera à l’ère messianique.

 (adapté à partir de Imré Cohen)

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PARACHAT VAYICHLA’H 5780 – Comment arriver à l’ère messianique ?

La vie de Ya’akov pose les jalons de l’histoire d’Israël. Parti en exil, il traversa une série ininterrompue d’épreuves : d’abord l’hostilité d’Ésaü, puis la fourberie de Laban et maintenant, de nouveau, l’affrontement avec son frère. Jusqu’à présent, Ya’akov séjournait dans un pays étranger, dans un milieu hostile. Il surmonta aussi cette épreuve et resta fidèle à lui-même : « J’ai séjourné chez Laban » – mais j’ai observé les 613 commandements et je n’ai rien appris de ses mauvaises actions (Rachi 32, 5). A présent, Ya’akov s’attend à une nouvelle offensive de Esaü et prend minutieusement toutes ses dispositions : « Il se prépara de trois façons : en envoyant des cadeaux, en priant et en se préparant au combat » (Rachi 32, 9). Quelle que soient les modalités de cette confrontation Ya’akov considère son frère comme un adversaire.

Cependant, l’épreuve qu’il affrontera sera plus éprouvante qu’il ne le pensait. Soudain, l’ennemi menaçant qui avançait à la tête d’une troupe armée fait volte-face et le traite en frère : « Esaü courut à sa rencontre, enlaça, tomba à son cou et l’embrassa ». L’épreuve de la fraternité, bien plus redoutable que les précédentes, suscita la prière que Ya’akov adressa à D.ieu : « Sauve-moi, de grâce, de la main de mon frère, de la main de Esaü » (32, 12).

Effectivement, Esaü allait suggérer à Ya’akov : « Voyageons et allons, j’irai à ton côté» (33, 12). Marchons ensemble, main dans la nain. Suivons le même chemin, nos conceptions se rejoignent. Cette attitude-là constitue le plus grand danger que puisse courir Ya’akov. En effet, s’il accepte ce compromis, il cessera d’être Ya’akov, il cessera d’être Israël.

Notre Patriarche est-il assez fort pour résister à cette terrible tentation ? D.ieu., qui n’envoie d’épreuves qu’aux personnes capables de les surmonter, va donc évaluer la résistance de Ya’akov. La lutte avec l’ange a pour but de tester la nature de sa foi. « Vayivatère Ya’aqov lévado – et Ya’akov resta seul » (32, 25) Nos Sages disent que l’on peut lire ce verset : « Vayivatère Ya’akov lékado – et Ya’akov resta pour ses ustensiles, ses cruches”. Sa foi est-elle superficielle, extérieure, à l’image d’une cruche, lekado, dont il est dit : « Ne donne pas d’importance à la cruche mais à ce qu’elle contient ? » Ou bien Ya’akov se présente-t-il lévado, seul, détaché de toutes attaches ou conjonctures sociales à l’instar de son grand-père, Abraham ? Saura-t-il garder, envers et contre tous, son identité spirituelle, sa foi totale ?

L’ange qui attaque Ya’akov est, selon le midrach, le mauvais instinct ou yétser hara, l’ange Sama-ël. Or, souma signifie “aveugle”. Le yétser hara aveugle l’homme et l’empêche de voir D.ieu. Dans le même sens, il est dit (32, 25) « Un homme combattit avec lui – vayéavèk ich ‘imo ». Dans le terme vayéavèq, on décèle le mot avak poussière. Dans leur lutte, dit le midrach, la poussière s’éleva. C’est le combat contre les forces qui veulent dissimuler, obscurcir par la « poussière », par les idéaux terrestres, la gloire divine dans le monde. Mais par la puissance de sa foi, Ya’akov résista et triompha de son adversaire. Alors, le voyant prêt, D.ieu lui fit affronter l’épreuve suivante, la plus difficile : la fraternité d’Essai !

Le peuple juif a traversé la période où « Esaü avait pris Ya’akov en haine… » et où il disait dans son cœur « …je tuerai Ya’akov, mon frère (27, 41), le temps où Laban le trompait, abusait de lui et voulait 5. perte : « l’Araméen voulait faire disparaître mon père » (Deutéronome 26, 5).

Israël a subi l’oppression romaine, les persécutions du Moyen Age ! Et nous pouvons dire qu’en général, à l’instar de notre Patriarche : J’a observé les six cent treize commandements et je n’ai pas appris de ses mauvaises actions ». Cependant, depuis l’ère de l’émancipation, notre peuple affronte l’épreuve la plus dangereuse : celle de la liberté et de la fraternité avec les nations qui veulent le détacher de son D.ieu Les portes des ghettos et des mellahs se sont ouvertes et les pertes ont ete effroyables. L’identité de notre peuple qui témoigne de l’existence de D.ieu sur terre et de la véracité de Sa loi est en jeu ! Bien qu’au bout du compte, « ton nom sera Israël » et que le Tout-Puissant nous aidera a triompher, notre rôle à nous est de lutter, d’être les artisans de cette victoire.

Aux descendants d’Esaü qui cherchent à nous attirer à eux en nous suggérant : « Voyageons et allons côte à côte, unissons nos idéaux, tâchons de nous ressembler, vivons en frères » nous répondons comme Ya’akov : « Les enfants sont délicats… moi, je voyagerai lentement, a mon allure» (33, 12-14). Si les parents ont su préserver leur identité juive, les enfants sont les plus menacés par la proposition d’Esaü -ils sont «délicats».

Veillons à leur inculquer les valeurs qui nous différencient des autres peuples et à les armer contre l’assimilation et la fusion avec le milieu ambiant. C’est ainsi que nous triompherons de cette terrible épreuve pour arriver, sains et saufs, au but final, « au lever ce l’aube», à l’époque messianique: «jusqu’à ce que j’arrive chez mon maître, à Sé’ir» répondit Ya’akov à la proposition de Esaü. C’est seulement à ce moment, explique Rachi, que nous rejoindrons Esaü. comme le dit le prophète: « Et les sauveurs monteront sur la montagne de Sion pour juger la montagne d’Esaü et la royauté de D.ieu.» (Ovadia 1, 21).

(adapté à partir de Imré Cohen)

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PARACHAT VAYETSE 5780 – L’ECHELLE DE LA VIE

Il (Yaakov) vit dans son songe : une échelle dressée sur la terre, son sommet atteignait le ciel ; et des messagers divins montaient et descendaient le long de cette échelle (Genèse 28, 12).

Nos Sages ont souligné l’importance de l’échelle dans ce récit biblique.  . Nous voudrions comprendre la dimension symbolique de l’échelle elle-même, de cet objet qui permet aux hommes de monter et de descendre.

Au début de la sidra, il est dit : Yaakov part pour ‘Haran, sur l’ordre de ses parents pour prendre une épouse parmi les filles de son oncle Laban. Ayant fait halte en chemin, il s’endort et fait un rêve lourd de sens : il y voit une échelle plantée en terre, dont le sommet atteint le ciel et sur laquelle montent et descendent des Anges célestes.

Quelle est la signification d’un tel rêve à un moment où Yaakov se trouve à la croisée des chemins ? Yaakov quitte Erets Israël, sa famille, son milieu et ses habitudes pour s’engager dans une voie nouvelle, tout à fait différente de celle qu’il a connue jusqu’à présent. Il va fonder un foyer, élever des enfants, travailler et vivre auprès de son beau-père, rencontrer Esau son frère, autant d’épreuves qui exigent une force de caractère peu commune ; la vie se présente à Yaakov comme une échelle, qu’il peut gravir ou descendre, à sa guise, et selon ses forces. S’il est en mesure de surmonter les difficultés et les tentations avec la force morale requise, il connaîtra l’ascension spirituelle mais si, au contraire, il se montre trop faible, il risque la déchéance.

C’est ainsi que doit être envisagée toute épreuve morale, toute expérience humaine, toute vie : dans le sens d’une descente ou d’une montée. Dans le premier cas, c’est la chute morale, la perte des valeurs. Dans le second cas, c’est l’élévation spirituelle, la progression dans les valeurs morales de sainteté, de pureté et d’attachement à D.ieu. L’homme, quel qu’il soit, risque, à tout moment au cours de son ascension, de trébucher et de tomber, et cela même s’il est parvenu à la perfection spirituelle du Juste.

Dans notre texte, Yaakov nous est présenté comme un tsadik, un fait qui est confirmé à deux reprises par le commentaire de nos Sages : tout d’abord au verset 10, à propos de son départ de Béér Chéva, Rachi rapporte :

Dans quel but nous parler de son départ ? C’est pour nous dire que le départ d’un d’un Juste, fait impression dans la ville. Tant que le Juste est dans la ville, c’est lui qui est sa beauté, c’est lui qui est son éclat, c’est lui qui est sa majesté…. Au verset 17 : Le Saint béni soit Son Nom a dit : « Ce tsadik — ce Juste — viendrait dans Ma demeure et s’en irait sans y passer la nuit ! » C’est D.ieu Lui-même qui confère à Yaakov le titre de tsadik. Mais l’homme, lui, n’aura jamais, à aucun moment de sa vie, la certitude de sa perfection morale, de son «succès» spirituel : D.ieu seul peut juger et trancher.

Yaakov a compris le sens du message qui lui est adressé dans le songe de l’échelle. Il sait qu’il va devoir affronter maintes difficultés et surtout se mesurer à un ordre de choses tout à fait nouveau. Aussi, avant d’arriver à ‘Haran, il fait un détour par la Yéchiva de ‘Ever : il y passe quatorze années entières à étudier la Torah et y puise les forces spirituelles nécessaires pour affronter Laban, puis, plus tard, son frère Esau. Les richesses spirituelles qu’il a acquises durant ces intenses années d’étude lui seront également essentielles pour établir son foyer et élever ses nombreux enfants dans ce milieu hostile qu’est la maison de Laban.

Yaakov s’est fixé encore un signe, un point de repère pour ne jamais trébucher sur cette voie semée d’embûches : il se promet de ne jamais oublier le sens véritable des événements et de toujours voir en toutes choses la marque de la Providence Divine. Yaakov prononça un vœu en ces termes : si D.ieu est avec moi, et qu’il me protège dans la voie où je marche, s’il me donne du pain à manger et des vêtements pour me couvrir, si je retourne en paix à la maison de mon père, et que !Eternel soit pour moi D.ieu, alors, cette pierre que je viens d’ériger en monument deviendra la maison de D.ieu et, tous les biens que Tu m’accorderas, je veux T’en offrir la dîme. (ibid. 20)

Est-ce là tout le sacrifice que Yaakov est prêt à faire ? Est-ce tout ce qu’il est prêt à payer en retour de tous les bienfaits, qu’il souhaite recevoir de D.ieu ? Cela s’appelle-t-il de la générosité ? Alors qu’il est en proie au dénuement le plus total au plus profond de la détresse, il se tourne vers D.ieu pour Lui demander de l’aider. Et que Lui promet-il en retour ? La dîme ! un dixième de ce qu’il recevra ! Imaginerions-nous une personne, démunie de tout, qui solliciterait l’aumône, et exprimerait sa grandeur d’âme en suppliant son bienfaiteur : «Accorde-moi un million ! En reconnaissance, je te donnerai cent mille !»

Très souvent, les hommes sont tellement convaincus que tous leurs biens, leurs acquisitions et leurs réussites matérielles sont le fruit de leurs efforts personnels, de leur intelligence supérieure, de leur zèle et de leur sens inné des affaires qu’ils finissent par avoir le sentiment inébranlable de leur maîtrise et de leur supériorité… au point d’oublier le principal instigateur de toutes choses, le Maître du monde. Ils sont sûrs en leur for intérieur que : C’est ma propre force, c’est le pouvoir de mon bras qui m’a valu cette richesse (Deutéronome 8, 17). Mais la Torah met en garde énergiquement contre une telle attitude : Garde-toi d’oublier Hachem, ton D.ieu, de négliger Ses préceptes, Ses institutions et Ses lois… (ibid. 8, 11).

Aux yeux de Yaakov, telle ou telle somme d’argent n’a pas d’intérêt.

Sa pensée est beaucoup plus profonde et se situe à un autre niveau : donner la dîme n’est ni une expression de générosité, ni de reconnaissance. La somme n’a ici aucune importance. Ce qu’il veut affirmer, c’est l’idée de la suprématie divine sur toute chose, sur tout bien, sur tout événement : je suis conscient que Tu es Celui qui donnes. Tout ce que j’ai, me vient de Toi seul ; rien n’est dû à mon pouvoir ou à mes capacités personnelles. Ce sont là les pensées de Yaakov en ce moment de profonde détresse. A cet instant même il prend la ferme décision de demeurer en communion avec D.ieu, malgré tout, et de donner la dîme de tout ce qu’il gagnera. Yaakov exprime ainsi sa foi inébranlable envers D.ieu.

(adapté a partir des Leçons Chabbatiques)

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PARACHAT TOLDOT 5780 : LE POUVOIR DE LA PRIERE

Yits’hak implora D.ieu au sujet de sa femme, parce qu’elle était stérile (Genèse 25, 21).

Nous sommes frappés, en lisant ce verset, par l’ordre inhabituel du récit : en effet, avant même de nous annoncer que Rivkah est stérile, la Torah nous raconte qu’Yits’hak a imploré D.ieu en sa faveur. Notre habitude des textes bibliques nous laissait attendre un ordre inverse dans la suite des événements: l’annonce de la stérilité de Rivcah aurait dû logiquement précéder celle de la prière d’Yits’hak.

Nous trouvons le phénomène analogue dans la section Vayétsé : Il [Yaakov] arriva dans cet endroit et il y passa la nuit, parce que le soleil s’était couché (ibid. 28, 11). Rachi explique ainsi : Le soleil s’était couché subitement, avant son heure, afin que Yaakov soit obligé de passer la nuit. Là aussi, l’ordre logique aurait dû être que le soleil se couche d’abord et qu’ensuite, Yaakov s’installe pour passer la nuit. Il nous faut donc admettre que les relations de cause à effet, telles qu’elles apparaissent dans la Torah, ne sont pas forcément conformes à la notion que nous avons du déroulement événementiel. Yits’hak n’a pas imploré D.ieu parce que Rivkah n’avait pas encore conçu ; la stérilité de Rivkah n’est pas la cause de la prière. En réalité, elle en est l’effet : pour qu’Yits’hak prie, il fallait que Rivkah soit stérile. De même, Yaakov ne s’est pas installé en ce lieu parce que le soleil se coucha ; mais c’est parce qu’il fallait que Yaakov passât la nuit en cet endroit, que le soleil se coucha subitement. Le coucher du soleil n’est pas la cause de l’installation de Yaakov en ce lieu, il en est l’effet, il fallait que Yaakov soit amené à faire là, sa prière.

Ces remarques nous conduisent à poser une question d’ordre plus général, qui touche à un point fondamental de notre foi : quelle est la signification profonde de cette stérilité qu’ont connue, tour à tour, les aïeules du peuple, Sarah, Rivkah, Ra’hel et plus tard, ‘Hanna et d’autres encore ? Quel était le dessein de la Volonté Divine ? C’est la question que le Talmud présente, en y apportant aussitôt sa réponse : Pourquoi nos aïeules étaient-elles stériles ? Rabbi Yits’hak dit : c’est parce que D.ieu, Béni soit Son Nom, aspire à la prière des Justes (Yévamoth 64). Ce texte, qui nous révèle la raison de la souffrance des aïeules, nous éclaire en même temps sur un point essentiel : la prière est la cause de la stérilité ; autrement dit, le Saint béni soit Son Nom a causé la stérilité, a créé une occasion, pour que l’homme prie; la stérilité est la conséquence et non la cause du besoin de la prière.

Pourquoi D.ieu aspire-t-Il à la prière des Justes, au point de leur causer de graves tourments, qui ne sont ni toujours compréhensibles, ni explicables ? Nous lisons dans le Talmud : «Rabbi Yichmaél Ben Elicha dit: Lorsque je suis entré une fois dans le sanctuaire du Temple pour présenter l’encens sacré, j’ai vu devant moi la Grâce Divine, installée sur un siège surélevé. Le Saint béni soit Son Nom s’adressa à moi en ces termes : « Yichmaél, Mon fils, bénis-Moi”. J’ai répondu: ”Que par Ta Grâce, Ta Miséricorde surmonte Ton courroux, que Ta pitié ‘cache Ton mécontentement et que Tu Te conduises avec Tes enfants avec indulgence et bienveillance ». Alors, le Tout-Puissant acquiesça d’un signe de tête (comme pour dire Amen, dit Rachi). D.ieu répond Amen à la bénédiction de RabbiYichmaél» (Bérakhot 7). Nous en concluons qu’il apprécie la prière des Justes.

Si nous nous en tenions à la logique exprimée par nos Sages, la prière ne devrait pas avoir de place en ce monde : celui qui a fauté mérite d’être puni et toutes les prières du monde ne devraient rien y changer. Au contraire, si le méchant ne reçoit pas le châtiment qu’il mérite, cela revêt l’allure de l’injustice. Il est donc naturel que nous nous demandions quel pouvoir, quelle force extraordinaire peut bien avoir la prière au point de changer la réalité, de rompre totalement avec la logique la plus élémentaire !

La réponse nous est fournie encore une fois dans la section de Toldot . Yits’hak et Rivkah prient de tout leur cœur, chacun de leur côté. D.ieu exauce en premier lieu la prière d’Yits’hak et agrée celle de Rivkah ensuite. Pourquoi une telle préférence ? Rachi explique : la prière d’un tsadik, (juste) fils de tsadik, est préférable à celle d’un tsadik, fils de racha (méchant). Rivkah eut l’immense mérite d’épouser Yits’hak. elle s’est engagée dans la voie spirituelle et religieuse de son mari, mais sa prière ne parvient pas à la pureté de la prière de son époux, car elle est fille de Laban, l’idolâtre. Yits’hak, lui, est fils d’Avraham. Il a puisé les enseignements et la foi de son père qui affirmait : Et moi je ne suis que terre et que cendres. Le caractère essentiel de la prière d’Yits’hak consiste dans l’effacement de toute aspiration personnelle au moment où il prie : tout son être, sa volonté et ses préoccupations personnelles, se réduisent au point de s’effacer complètement devant la Gloire infinie du Créateur : toutes les pensées, tous les projets, les comptes personnels s’effacent au moment où s’élève la prière de l’homme vers le Tout-Puissant.

C’est dans cette perspective que se situe le tsadik : sa prière dépasse toutes les autres prières parce qu’elle est pure, détachée de toute sollicitation personnelle, débarrassée de tout intérêt égoïste. Le tsadik fait abnégation de lui-même, pour ne rechercher que le bien d’autrui. Yits’hak n’a d’autre préoccupation que le bien-être de Rivcah. Son père, Avraham, nous nous en souvenons, ne poursuivait qu’un seul et unique but ; sauver Sodome de l’anéantissement total, en adressant une ardente prière à Dieu. Dans l’épisode rapporté plus haut, Rabbi Yichmael Ben Elicha recherche le bonheur de son peuple, et un meilleur sort pour les enfants d’Israël, il implore la bienveillance divine en faveur de ses frères.

C’est à cette prière-là que D.ieu aspire : celle qui s’occupe d’autrui et qui sollicite pour autrui. Nous comprenons alors cette tradition ancestrale, si profondément ancrée dans le peuple juif, qui consiste à se tourner vers le tsadik pour lui demander de prier, d’intercéder auprès du Tout-Puissant pour obtenir la grâce divine pour les malheureux. Seul, le tsadik est en mesure de faire abstraction totale de sa propre personne, de ses propres problèmes pour demander à D.ieu la délivrance et le salut pour les autres. L’homme qui est capable d’une telle prière a de plus grandes chances d’être entendu.

(adapté à partir des Leçons Chabbatiques)

hevron

PARACHAT ‘HAYE SARAH 5780 – COMMENT ACCOMPLIR LA VOLONTE DIVINE ?

Pour quelle raison Avraham tenait-il tant à enterrer Sarah dans le caveau de Makhpéla à Hebron ? Lors de la visite des trois anges, sous l’apparence de voyageurs arabes qu’Avraham convia, nous raconte le midrach, Avraham voulut honorer ses invités d’un plat de viande. « Et, Avraham courut vers le troupeau » précise le verset.

Pourquoi Avraham s’élança-t-il vers le troupeau ? Parce que le veau qu’il avait choisi lui échappa et se mit à courir sans s’arrêter. Avraham, âgé et malade, se lança à sa poursuite et le rejoignit dans la grotte où, au bout de sa course, l’animal avait trouvé refuge. En y pénétrant, Avraham fut frappé par l’odeur de Gan Eden qui émanait de cet endroit particulier et y découvrit le tombeau de Adam et ‘Hava. « C’est ici que je désire être enterré » décida-t-il.

La Me’arath hamakhpéla – littéralement « le double caveau » est ainsi appelée, nous dit Rachi, car elle abrite la sépulture de quatre couples : Adam et ‘Hava, Avraham et Sarah, Yits’haq et Rivka, Ya’aqov et Léa. Adam et ‘Hava représentent le modèle de l’être humain en puissance : l’élément central de la Création.

Nos Patriarches, représentent le modèle de l’être humain qui concrétise et met en actes le but de la Création.

Par quel mérite Avraham découvrit-il cette grotte qui donnait accès au Gan Eden ? Parce que, malade et âgé, il s’était surpassé en poursuivant l’animal en fuite afin d’accomplir la mitsva de recevoir des invités à la perfection. Le « dédoublement » de ses forces pour réaliser la volonté divine, c’est là le sens de Me’arath hamakhpéla – du « double » caveau.

Le Talmud rapporte une discussion entre Rav et Chemouel sur la nature de cette grotte. Rav dit «c’était un caveau à étages », Chemouel dit que « c’était une salle comprenant une pièce intérieure ». De ces deux opinions nous apprenons qu’il existe essentiellement deux catégories d’actes : certains actes sont dirigés vers l’extérieur – la tsédaka, par exemple. D’autres actes sont tournésvers l’intérieur – comme l’étude de la Torah. Les uns comme les autres exigent de l’homme un don de soi, beaucoup de sacrifices.

On connaît l’explication de Rachi, dans le traité de Pessa’him, sur 1a michna : « Sois audacieux comme la panthère, léger comme l’aigle rapide comme le cerf et fort comme le lion pour accomplir la volonté de ton Père qui est au Ciel. »

Peut-on réellement être aussi fort que le lion, aussi rapide que l’aigle ? Non ! Cependant cette michna nous enseigne que, pour servir D.ieu, l’homme doit aller au-delà de ses capacités et se surpasser. On ne s’acquitte pas de son devoir en disant : « Je fais ce que je peux ! ». Pour observer les mitsvot , nous devons nous efforcer d’aller au-delà de nos forces. Alors, D.ieu nous aidera à accomplir les commandements.

Ce principe essentiel, hérité des patriarches qui reposent dans la “Me’arath hamakhepéla”, nous mènera assurément à l’entrée du Gan Eden.

(adapte a partir de Imré Cohen)

etoile jaune

PARACHAT TETSAVE 5776: COMMENT COMBATTRE L’ANTISEMITISME ?

Ce Chabbat, nous allons lire dans un deuxième rouleau de la loi, la parachat Zakhor. Cette section doit nous rappeler, chaque année, que la guerre contre Amalek n’est pas terminée et que se poursuit : « le combat pour D.ieu contre Amalek de génération en génération » (Exode 17, 16).

«Aussi, lorsque l’Eternel ton D.ieu t’aura débarrassé de tous tes ennemis d’alentour… tu effaceras la mémoire d’Amalek… ne l’oublie point ! » (Deutéronome 25, 19). Quel est le sens de ce verset essentiel ? Pourquoi nous souvenir d’Amalek précisément au moment où D.ieu nous aura délivré de nos tourments ?

Nos Sages nous enseignent à propos de l’histoire de Pourim que c’est à partir de ce moment-là que nos ancêtres ont réellement accepté la Torah de plein gré. Jusqu’alors, une grande partie des Juifs l’avaient observée « parce qu’il le fallait ». Pourquoi Pourim a-t-il fondamentalement modifié cet état d’esprit ?

Si nous interrogeons l’Histoire, nous voyons que l’épisode de Pourim est le premier drame que le peuple juif ait vécu après l’exil de Babylone, époque à laquelle il a été dispersé parmi les nations. C’est en effet la première fois que notre peuple a été mis en contact avec les peuples et c’est en cela que l’histoire de Pourim prend toute sa signification.

La Perse, qui dominait en ces temps-là tout le monde connu, « de l’Inde à l’Ethiopie », était un pays hautement civilisé. N’était-ce pas le berceau de la civilisation indo-européenne ? Son niveau culturel et moral était très élevé ; on allait même jusqu’à ne plus faire de discrimination, si bien que tous les Juifs furent invités au festin d’Assuérus comme des citoyens à part entière.

Esther n’est-elle pas devenue reine ? Nombreux ont dû être ceux des nôtres qui disaient : « La Torah ? Oui, bien sûr, elle était nécessaire dans le temps, il y a quelques centaines d’années, lorsque les peuplades d’alentour étaient barbares. Il fallait nous séparer d’eux, nous distinguer de leur mode de vie primitif. Aujourd’hui, des progrès considérables ont été faits ! La civilisation perse est un modèle d’ouverture, tous les droits nous sont accordés ! »

Et c’est à ce moment-là que  »le sort tomba ». Comme un éclair, le décret d’extermination de tous les Juifs en un seul jour fut décidé. Le peuple d’Israël comprit alors ce que valaient les lois démocratiques, la société moderne, la civilisation et la culture. Non ! Les juifs ne peuvent plus se bercer d’illusions. Il n’existe qu’une voie pour les conduire et les sauver : la voie de la Torah. A l’époque de Pourim, tous es Juifs sans exception l’ont acceptée de plein gré : cette Loi qui nous vient de D.ieu est la seule qui soit véritablement morale, la seule que nous puissions suivre.

A présent, nous comprenons le sens du verset « lorsque D.ieu t aura débarrassé de tous tes ennemis d’alentour», c’est alors que «n’oublie pas ! » Lorsque D.ieu t’aura délivré et que tout ira bien pour toi, arrivera le moment le plus dangereux où tu risqueras d’être séduit par telle ou telle théorie, telle ou telle culture étrangère. Souviens-toi alors que tu as en face de toi, le même Amalek « qui ne rapproche autrui que pour son profit ».

Hélas! Combien de fois Israël a-t-il oublié de lire parachat Zakhor ! Nombreux furent ceux qui, il y a quelques dizaines d’années, après que D.ieu t’aura débarrassé de tous tes ennemis », ont cru à l’émancipation des pays occidentaux, à leur culture attirante, à leur prétendue moralité. Il les ont imaginés au-dessus des crimes des époques passées. Comme le démenti que D.ieu nous a envoyé durant cette dernière guerre a été brutal !

Même après le terrible holocauste, lorsque D.ieu nous a délivrés de nos ennemis nazis, combien des nôtres ont naïvement cru que l’antisémitisme était désormais révolu ! Combien ont placé leur confiance dans le grand peuple qui fut le premier à reconnaître l’Etat juif ! Combien ont mis leurs espoirs dans la nation qui soutenait militairement le jeune état !

Combien d’autres ont pensé que, dans le domaine spirituel, la fin de l’antisémitisme dépendait d’une alliance des esprits, d’une union entre les « penseurs » du Judaïsme et ceux des « religions-sœurs » ! Nous avons encore oublié de lire parachath Zakhor : «N’oublie pas!» Nous enregistrons dans toutes les directions des démentis cinglants à tous les chemins que nous pensions suivre. Le seul, authentique, qui nous reste est celui de la Torah.

Restons les fidèles descendants de Mordekhaï et de ses contemporains qui ont compris que notre seule issue est d’accepter la Torah « de plein gré ». Comme à Pourim, D.ieu nous enverra alors la délivrance totale!

(adapté à partir d’IMRE COHEN)

mishkane

PARACHAT TEROUMA 5776- Comment faire résider D.ieu en nous ?

«Ils me feront un sanctuaire et Je résiderai en eux.»

(Exode 25, 8)

Comment la Chékhina, la présence divine, pouvait-elle résider dans le petit espace compris entre les deux chérubins qui surplombaient le couvercle de l’Arche sainte alors que « toute la terre est remplie de Sa Gloire » ?

Pour répondre à cette question, il nous faut comprendre la requête du Saint béni soit-Il en nous ordonnant de construire le Sanctuaire, le Mikdach.

Il est vrai que D.ieu est partout et qu’il emplit l’univers entier à l’exception d’une petite partie : le cœur de l’homme, comme il est dit : « Tout provient du Ciel sauf la crainte du Ciel !»

D.ieu ne pénétrera à l’intérieur de l’homme que s’il le Lui permet. La tâche que chacun doit se fixer est donc d’introduire la crainte du Ciel en son cœur comme l’indique le verset : « Ils feront pour Moi un sanctuaire et Je résiderai en eux » [en les Enfants d’Israël et non « Je résiderai en lui », dans le sanctuaire]. C’est dans leur cœur que Je désire résider !

Nous touchons là à l’un des fondements du Judaïsme. Pour nous, il n’existe qu’un moyen d’amener D.ieu dans notre cœur, c’est-à-dire de ressentir Sa présence. Tandis que les religions préconisent l’isolement, la chasteté, le recueillement ou autres moyens artificiels de ce genre, D.ieu nous enjoint uniquement de réaliser l’accomplissement intégral de Ses commandements. « Ils feront pour Moi un sanctuaire et Je résiderai en eux ». « Lorsqu’ils auront construit le Tabernacle, Je serai parmi eux. »

La construction du Mikdach n’est autre que le symbole de cette action : l’accomplissement de la parole de D.ieu.

Or cet acte doit répondre exactement à l’ordre divin : les objets du Tabernacle devaient avoir une mesure extrêmement précise, l’encens devait être fabriqué selon une composition bien définie, les sacrifices ne devaient présenter absolument aucun défaut. L’exactitude dans l’accomplissement des mitsvot, le diqdouq hamitsvot, est la condition première de la résidence de la présence divine dans le monde, de la hachraath haChékhina.

Prenons les tephilines à titre d’exemple. De même qu’une connexion radio ne peut être captée qu’à un endroit défini, si les phylactères n’ont pas été placés sur la tête à l’endroit précis déterminé par la halakha, c’est comme si elles étaient restées dans leur sac !

De plus, pendant l’accomplissement de la mitsva, la pensée de l’homme doit être pure et désintéressée. « Ils feront pour Moi un sanctuaire. » Rachi dit : « Pour Moi, c’est-à-dire pour mon Nom ». Aucun intérêt personnel d’honneur ou d’argent ne doit déterminer nos actes pour D.ieu.

Pour nous, aujourd’hui, la tâche n’a pas changé. Le Talmud dit : « Toute génération qui ne voit pas la reconstruction du Temple est considérée comme le témoin de sa destruction ».

Pour mériter que se concrétise le verset : « Je résiderai parmi vous » nous devons nous acquitter de notre tâche : « Ils Me feront un sanctuaire ». Au sens large, cela signifie pratiquer les mitsvot selon toutes les règles édictées par D.ieu et les observer de façon désintéressée.

Lorsque nous serons parvenus à faire résider D.ieu dans notre cœur, nous mériterons de voir la reconstruction du Sanctuaire.

(adapté à partir de Imré Cohen)

liberte

Parachat Michpatim 5776- L’oreille: Prix de la liberté

«Si l’esclave dit : …Je ne veux pas être affranchi…son maître lui percera l’oreille avec un poinçon et il le servira indéfiniment»

Lorsqu’un homme est vendu comme esclave, que ce soit sur sa propre initiative, ou par le tribunal, la Torah y voit une défaillance de cet homme, elle le considère comme quelqu’un qui a trébuché. L’esclavage n’a pas fonction de châtiment, mais cherche à éveiller la conscience de l’homme et à l’inciter au repentir. Dans ce cas, il n’y a pas encore de raison de poinçonner son oreille. Il a trébuché, comme cela arrive au commun des mortels. Mais lorsque cet homme se complaît dans son état d’esclave et décide de son plein gré de rester esclave, cela signifie qu’il n’a pas compris la leçon, qu’il ne saisit pas la portée du drame que cache l’éloignement de D.ieu. Il ne désire pas se réconcilier avec son Créateur. Il reste insensible à l’enseignement que son oreille avait entendu au Mont Sinaï. C’est alors qu’il faut le remuer, qu’il faut poinçonner son oreille, lui faire comprendre la gravité de la situation spirituelle à laquelle il s’est laissé entraîner. Et si, par malheur, ses oreilles restaient sourdes au message, néanmoins les personnes qui le croisent dans la rue et le regardent, seront, elles, en mesure de tirer la leçon de la condition humaine et de comprendre la nécessité et l’urgence de prêter une oreille toujours attentive à la voix de la Torah et à l’enseignement de nos Sages.

C’est par l’intermédiaire de l’oreille que se construit tout le service sacré. Cela commence par la profession de foi, récitée deux fois par jour et dont le premier mot est : « Ecoute ». Ecoute Israël FEternel est notre D.ieu, l’Eternel est Un. Ecoute, cela signifie prête l’oreille. Bien d’autres versets présentent la même exigence: Si vous écoutez….parce que tu as écouté la voix de ta femme…, Yitro entendit… notre fils n’écoute pas notre voix et bien d’autres exemples encore. Yitro a entendu la sortie d’Egypte, il en est parvenu à se rapprocher du peuple juif. Par contre, Balak a vu la grandeur du peuple mais il a cherché à le maudire. Le sens de l’ouïe de Yitro a eu des conséquences bien plus bénéfiques que le sens de la vue de Balak.

Lorsque le prophète Nathan voulut attirer l’attention du roi David sur l’acte répréhensible qu’il avait commis dans l’histoire de son mariage avec Bath-Shéva, il lui raconta l’anecdote de deux hommes, l’un riche, et l’autre pauvre. Le riche avait préféré prendre à son frère pauvre le peu qu’il avait, en l’occurrence une brebis, plutôt que de risquer de réduire son immense fortune personnelle. Le roi David, révolté par la conduite odieuse du riche, décréta qu’il méritait la peine de mort. Or, selon les lois de la Torah, l’auteur d’un tel méfait aurait dû être seulement condamné à payer une amende de quatre fois la valeur de la brebis abattue, mais, ici, le riche avait été condamné à mort ! C’est que sa conduite infâme dénotait une immoralité profonde qui devait être réprimée. Au terme de son récit, le prophète Nathan attira alors l’attention du roi David sur le verdict qu’il venait de prononcer et lui demanda d’écouter ce que sa propre bouche venait de prononcer et lui déclara : «Cet homme, c’est toi-même !» ( Samuel 12, 1).

Avant de clore le livre du Pentateuque, D.ieu a voulu que cette faculté de l’ouïe soit utilisée pour le bien d’Israël et II a pris à témoins les cieux et la terre -.Ecoutez, cieux, Je veux parler et que la terre entende les paroles de Ma bouche (Deutéronome 32, 1). Il faut que même les cieux et la terre « prêtent l’oreille », qu’ils écoutent l’enseignement divin afin qu’il soit respecté et suivi par le peuple d’Israël pour assurer le bien de tout l’univers. Le rôle de l’oreille est primordial dans l’accomplissement du service divin.

L’oreille est un organe essentiel : elle établit le lien entre l’homme et le milieu environnant. Celui qui n’entend pas, n’a pas de relation avec le monde qui l’entoure et ne peut recevoir aucun enseignement. C’est l’oreille qui permet à l’homme d’entendre et de capter le message de la Torah. Si l’oreille est fermée à l’enseignement, elle doit être percée. En effet, en refusant le message qui lui est livré par le truchement de l’oreille, cet homme – esclave – refuse, renie l’enseignement de la Torah et rompt tout lien avec les commandements. Car, à partir du moment où l’homme assume la condition d’esclave, il est dispensé de faire les mitsvot. Son oreille doit donc être percée pour le rappeler à tout moment, à la réalité, à ses devoirs envers D:ieu et son peuple.

(Adapté à partir des Leçons Chabbatiques)

matane torah

PARACHAT YITRO 5776- LE DON DE LA TORAH : DOUBLE TABLE D’ALLIANCE

Comme on le sait, les commandements de la Torah sont divisés en deux catégories : celles de l’homme envers D.ieu et celles de l’homme envers son prochain. Les Tables de la loi étaient composées de deux Tables semblables, l’une comportant des devoirs entre l’homme et D.ieu, l’autre les devoirs entre l’homme et son prochain. Cette distinction se retrouve dans deux catégories de lois : les ‘houqim et les michpatim. Les ‘houqim, inaccessibles à l’entendement humain, sont des lois entre l’homme et D.ieu. Les michpatim désignent des lois logiques régissant les rapports entre l’homme et son prochain. Rachi explique que, contrairement aux ‘houqim qui sont des « décrets du Roi », les michpatim auraient pu être émis par les peuples eux-mêmes. Tout le monde admet aujourd’hui que ces lois constituent le fondement de l’ordre social de l’humanité.

Lorsque nous lisons la paracha de Yitro – la grandeur du don de la Torah, de la Révélation du Sinaï, l’importance des préparatifs, la purification des enfants d’Israël et leur attente que D.ieu Lui-même s’adresse à eux pour leur révéler Sa Loi – on est presque déçu, pourrait-on dire, de constater que l’homme aurait pu découvrir par lui-même plus de la moitié des dix commandements !

La preuve en est que lorsqu’en étudiant la Torah, on aurait pu trouver une halakha par la déduction logique, le Talmud pose la question : pourquoi la Torah cite-t-elle cette loi que nous aurions pu la découvrir par nous-mêmes».

La question se pose, a fortiori, lors du don de la Torah où D.ieu Lui-même est descendu sur le Mont Sinaï pour nous donner des lois que nous aurions pu instituer nous-mêmes !

Le Tout-Puissant avait une intention bien précise en nous donnant des ‘houqim et des michpatim gravés une Table double : les deux Tables n’étaient pas distinctes mais indissolublement liées. Nous comprenons bien que les ‘houqim sont à accomplir car D.ieu nous les a ordonnés puisque nous n’en saisissons pas le sens. Or, D.ieu nous a aussi ordonné les michpatim pour que nous les accomplissions exactement dans le même esprit, pour obéir à Sa Volonté et non pas parce que ces mitsvot sont bonnes pour nous-mêmes ou pour la société.

Qu’avons-nous gagné à ce que ces derniers commandements soient décrétés par D.ieu ?

Au niveau du mérite : « Celui qui agit parce qu’il en a reçu l’ordre est plus grand que celui qui agit sans en avoir reçu l’ordre » disent nos Sages. Quiconque fait une bonne action non pas par tendance naturelle ou par intérêt mais tout simplement parce que c’est un commandement divin, accomplit la mitsva de façon plus désintéressée. Son acte sera donc d’autant plus méritoire.

Au niveau de la perfection de l’acte : sachant que la mitsva émane de la volonté de D.ieu l’homme l’accomplira de façon intégrale exactement D.ieu l’a demandé sans l’accommoder au gré de ses besoins ou de son bon vouloir.

Les michpatim, les commandements logiques tels que « tu ne tueras point, tu ne voleras point… » ne sont pas soumis à l’appréciation de chacun selon la flexibilité aléatoire de sa conscience !

On comprend aisément la difficulté des peuples à accepter les ‘houqim, ces décrets incompréhensibles à l’entendement humain. Ce que nous saisissons mal c’est pourquoi ont-elles refusé la Torah en se déclarant incapables de se soumettre à des michpatim tels que « Tu ne tueras point, Tu ne voleras point… » !

Ces lois élémentaires ne sont-elles pas les règles sociales indispensables à toute société sous peine de sombrer dans l’anarchie et la loi de la jungle ? En réalité, les nations ne s’attendaient pas à ce que ces michpatim qu’elles pouvaient très bien instituer elles-mêmes leur soient dictés par D.ieu « S’il en est ainsi, pensèrent-elles, nous ne pourrons pas nous contenter d’observer ces commandements en les adaptant à nos intérêts. Il nous faudra les accomplir scrupuleusement et à la lettre ! » Cela, les peuples du monde ne pouvaient l’accepter. Or, c’était pour leur démontrer la nécessité d’une loi révélée et absolue, que D.ieu a choisi de présenter justement cette catégorie de mitsvot aux nations. Il désirait leur prouver que, vu la subjectivité des législateurs, toute législation d’origine humaine ne pourra jamais s’imposer comme justice absolue. Elle sera toujours contestable par définition

Seules les lois d’origine divine, dégagées de toute subjectivité peuvent maintenir une ligne réellement morale. Mais les nations sollicitées, refusant de soumettre leurs lois sociales à l’étalon de l’absolu divin, ont rejeté la Torah.

Nous, Juifs, qui avons dit « Na ‘assé vénichma »- nous ferons et nous écouterons », accomplissons les michpatim au même titre que les ‘houqim. Pour nous, les deux Tables de la Loi sont étroitement liées. Nous devons accomplir chaque commandement envers notre prochain de façon intégrale selon toutes les règles que D.ieu nous a édictées pour la seule et unique raison qu’il nous l’a ordonné. L’interdiction de voler s’applique à chaque centime. « Tu ne tueras point ! » tranche implacablement les controverses à propos de l’avortement et de l’euthanasie…

Seul le peuple juif a compris la nécessité d’une loi révélée et c’est pourquoi il est le seul à détenir un système de lois qui resteront à jamais morales et infaillibles.

(adapté à partir de Imré Cohen)

mer rouge

PARACHAT BECHALA’H 5776- LA LIMITE ENTRE NATURE ET MIRACLE

Le midrach rapporte qu’au moment où les flots de la mer engloutissaient les Egyptiens, les anges de service entreprirent d’entonner un cantique de louange en l’honneur de l’Eternel. Le Tout-Puissant interrompit les anges en disant : « Comment cela ? Ceux que Mes mains ont formés se noient dans la mer, et vous vous permettez de chanter ! » Le sens de ce midrach n’apparaît pas clairement d’autant plus que la Chira, ce « cantique de la Mer» qu’il est interdit aux anges de chanter a finalement été entonné par les Enfants d’Israël.

Le cantique de la mer (chirat hayam) semble revêtir une importance plus grande que le miracle de l’ouverture de la mer Rouge puisqu’il a été choisi pour faire partie de notre liturgie quotidienne où il occupe une place de choix.

Le passage de la Mer Rouge permet de mieux comprendre la notion de miracle. Il est difficile de définir le miracle comme une intervention exceptionnelle de D.ieu par opposition au déroulement naturel des événements. En effet, la limite entre miracle et nature se réduit à bien peu de choses. Maïmonide ne dit-il pas qu’une loi naturelle est constituée d’un nombre infini de miracles juxtaposés. Peut-on dire qu’il existe une différence fondamentale entre l’ouverture de la Mer Rouge et le miracle de la germination d’une graine, par exemple ? L’intervention divine est-elle moins merveilleuse dans un cas que dans l’autre ? La différence entre ces deux prodiges s’établit selon la rareté ou la fréquence de leur apparition. La germination est un phénomène qui se produit des milliards de fois chaque jour mais la Mer Rouge s’est fendue une seule fois depuis la création du monde. C’est donc ce dernier phénomène qui, par sa rareté, s’impose à nous en tant que miracle. Objectivement, miracle? Les phénomènes naturels se confondent mais le miracle est subjectif n’existe que dans la mesure où nous, hommes, l’interprétons et l’acceptons comme tel.

La Chira occupe une place prépondérante dans la liturgie car chanter le Cantique de la Mer Rouge, c’est reconnaître l’intervention de D.ieu dans tous les événements, c’est rejeter l’interprétation pseudo scientifique d’un déroulement  »accidentel » des faits. Non seulement nous reconnaissons le miracle mais nous l’authentifions. Ce cantique peut seulement être chanté par l’homme, détenteur du libre arbitre car lui seul a la possibilité d’accepter ou de refuser d’admettre l’intervention de D.ieu dans le monde.

L’ange, lui, ne doit pas chanter ce cantique, car son chant est fondamentalement différent de celui de l’homme. Tandis que l’homme interprète un événement comme surnaturel puis compose un cantique à l’Eternel, le chant de l’ange n’est que le prolongement, la projection, de l’œuvre de D.ieu dans ses multiples formes et manifestations.

Le midrach rapporte que D.ieu a empêché les anges de chanter un cantique car la séparation des eaux de la Mer Rouge, considérée objectivement comme un miracle (que les anges voulaient célébrer par un cantique), n’a pas plus de valeur pour Lui que le miraculeux agencement du corps humain. La disparition de « l’œuvre de Mes mains » dans les flots a causé une grande souffrance à D.ieu.

Les Egyptiens n’ont pas voulu voir et ressentir les miracles opérés par la Providence et ils ont été engloutis dans les flots. Cependant les enfants d’Israël les ont reconnus et attestés en chantant le Cantique de la Mer.

Ce qui importe le plus pour D.ieu, ce sont les choix que l’homme fait dans ce monde pour sanctifier Son Nom.