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Paroles de Torah sur la section lue chaque semaine

le merite des femmes et rosh hodesh

PARACHAT VAYIKRA –PARACHAT HA’HODECH 5775- ROCH ‘HODECH NISSANE

LE MERITE DES FEMMES ET ROCH’HODECH

Nos Sages sont en désaccord sur la date de la création du monde. Rabbi Yehochoua pense que le monde a été créé en Nissan et Rabbi Eleazar est d’avis qu’il a été créé en Tichri.

Prenant position dans cette discussion, le Sefath Emeth émet l’opinion qu’en fait, nous nous trouvons en face de deux Créations distinctes : l’une en Nissan et l’autre en Tichri.

Celle de Tichri, point de départ du déroulement continu des lois de la nature (téva), est liée au destin des nations du monde tandis que la création de Nissan, mois de rupture des lois naturelles (Ness) est le propre d’Israël.

Or, la spécificité de D.ieu par rapport à l’homme ne réside pas tant dans la « Nature » mais bien plus dans le renouvellement, le jaillissement inattendu de Son Intervention. D’après le Sefath Emeth, les lois naturelles ne sont qu’une sorte de restriction (tsimtsoum) que le Saint Béni soit-Il s’est imposé à Lui-même. Il a voulu que l’homme, confronté à l’éternel recommencement des phénomènes, puisse trouver le fil conducteur qui lui fera découvrir Sa grandeur et l’amènera jusqu’à Lui.

Mais il s’agit là du cheminement des peuples du monde, dans l’optique de Tichri.

La communauté d’Israël possède, quant à elle, une « voie directe » pour atteindre le Créateur : «… Qui saute par dessus les montagnes » (Cantique des cantiques).

C’est la voie de la Torah : « le mois de Nissan sera pour vous le premier des mois… »

Le premier Nissan de la deuxième année de la Sortie d’Egypte, jour   réunit dix couronnements, entre autres l’inauguration du Tabernacle, l’apparition de la Majesté divine au-dessus du Sanctuaire, la consomption des sacrifices par le feu sacré descendu du ciel. (Chabbat 87b)

Les femmes s’étaient empressées d’apporter les premières leurs dons pour la construction du Tabernacle, comme il est dit « Et les hommes vinrent après les femmes » (35, 22). Or, soulignent nos Sages, nous savons que lors de la faute du veau d’or, les femmes avaient refusé de donner leurs bijoux, conformément au rôle qui leur fut assigné depuis la Création (Genèse 2, 18). «D.ieu dit: ce n’est pas bon que l’homme soit seul, Je vais lui faire une aide – qénégdo - face à lui [ou contre lui] ». Rachi explique le sens de qénégdo : « Si l’homme est méritant, elle sera une aide face à lui mais s’il ne l’est pas, elle luttera contre lui ». Devant le refus des femmes, les hommes ont dû donc se défaire de leurs propres pendentifs pour confectionner leur idole (32, 2-3). Il en fut autrement pour la construction du Sanctuaire. Les femmes furent les premières à offrir ce qu’elles avaient de plus précieux. C’est pour cette raison, rapporte le Choul ‘han Aroukh (et le Talmud Meguila 22) que les femmes ont droit à une fête supplémentaire : Roch ‘Hodech où elles n’effectuent pas certains travaux.

Pourquoi justement Roch ‘Hodech ? Comme nous le savons, le Michcan fut inauguré le jour de Roch ‘Hodech Nissan et c’est la raison pour laquelle chaque Roch ‘Hodech reste une fête réservée aux femmes.

Mais nous pouvons également établir un autre lien entre les femmes et Roch ‘Hodech :

Lorsque dans le désert, elles firent don pour le Tabernacle des miroirs de cuivre dont elles se servaient en Egypte, Moïse ne voulut pas les accepter. Toutefois, D. lui demanda expressément de les prendre pour la confection du Kiyor, le bassin servant à l’ablution des Cohanim. (Rachi 38, 8). En effet, c’est au moyen de ces miroirs que ces femmes courageuses avaient redonné une raison de vivre à leurs maris qui, abattus par le terrible esclavage, étaient dans un état de découragement complet. Tout au long de l’histoire, le rôle des femmes fut déterminant au moment où tout semblait perdu. Lorsque le Gadol hador, Amram, décida de ne plus avoir d’enfant, puisqu’on jetait les garçons dans le fleuve, tous les Hébreux l’imitèrent. Ce fut grâce à Myriam, qui réunit à nouveau ses parents, que non seulement Moïse vint au monde mais que le peuple juif fut sauvé de la disparition complète ! Il en fut de même à ‘Hanoucca avec Yehoudith, à Pourim avec Esther et tout au long des générations jusqu’à la Rédemption qui, à l’instar de la Sortie d’Egypte, arrivera comme on le sait par le mérite de notre mère Ra ‘hel et des femmes justes (tsadkaniot).

Telle est la signification profonde de Roch ‘Hodech : subitement, le premier jour du mois, la lune renaît après une absence totale de clarté. Auparavant dans l’obscurité complète, le monde semblait plongé dans des ténèbres éternelles. Ce moment de renaissance de la lumière reste réservé aux femmes, c’est leur fête particulière car ce sont elles qui possèdent, par la force de leur foi le don de l’espoir, le pouvoir du renouveau.

(adapté a partir de Imre Cohen)

rome

Paracha Vayichla’h 5775

L’ULTIME EPREUVE

« Essav courut à sa rencontre, l’enlaça, tomba à son cou et l’embrassa »

(Genèse 33, 4)

La vie de Ya’akov pose les jalons de l’histoire d’Israël. Parti en exil, il traversa une série ininterrompue d’épreuves : d’abord l’hostilité de ‘Essav, puis la fourberie de Lavane et maintenant, de nouveau, l’affrontement avec son frère. Jusqu’à présent, Ya’akov séjournait dans un pays étranger, dans un milieu hostile. Il surmonta aussi cette épreuve et resta fidèle à lui-même : «J’ai séjourné chez Lavane» mais j’ai observé les 613 commandements et je n’ai pas appris de ses mauvaises actions (Rachi 32, 5).

A présent, Ya’akov s’attend à une nouvelle offensive de ‘Essav et prend minutieusement toutes ses dispositions : «Il se prépara de trois façons : en envoyant des cadeaux, en priant, et en se préparant au combat » (Rachi 32, 9). Quelle que soient les modalités de cette confrontation, Ya’akov considère ‘Essav comme un adversaire.

Cependant, l’épreuve qu’il affrontera sera plus éprouvante qu’il ne le pensait. Soudain, l’ennemi menaçant qui avançait à la tête d’une troupe armée fait volte-face et le traite en frère : « ‘Essav courut à sa rencontre, l’enlaça, tomba à son cou et l’embrassa ». L’épreuve de la fraternité, bien plus redoutable que les précédentes, suscita la prière que Ya’akov adressa à D.ieu : « Sauve-moi, de grâce, de la main de mon frère, de la main de ‘Essav » (32, 12).

Effectivement, ‘Essav allait suggérer à Ya’akov : « Voyageons et allons, j’irai à ton côté» (Genèse 33, 12). Marchons ensemble, main dans la main. Suivons le même chemin, nos conceptions se rejoignent. Cette attitude-là constitue le plus grand danger que puisse courir Ya’akov. En effet, s’il accepte ce compromis, il cessera d’être Ya’akov, il cessera d’être Israël.

Notre Patriarche est-il assez fort pour résister à cette terrible tentation ? D.ieu, qui n’envoie d’épreuves qu’aux personnes capables de les surmonter, va donc évaluer la résistance de Ya’akov. La lutte avec l’ange a pour but de tester la nature de sa foi. «Saura-t-il garder, envers et contre tous, son identité spirituelle, sa foi totale» ?

L’ange qui attaque Ya’akov est, selon le midrach, le mauvais penchant (yétsér hara). Le yétsér hara aveugle l’homme et l’empêche de voir D.ieu. Dans le même sens, il est dit «Un homme combattit avec lui vayéavèq ich ‘imo» (Genèse 32, 25). Dans le terme vayéavèk, on décèle le mot avak, poussière. Dans leur lutte, dit le midrach, la poussière s’éleva. C’est le combat contre les forces qui veulent dissimuler, obscurcir par la « poussière », par les idéaux terrestres, la gloire divine dans le monde. Mais par la puissance de sa foi, Ya’akov résista et triompha de son adversaire. Alors, le voyant prêt, D.ieu lui fit affronter l’épreuve suivante, la plus difficile : la fraternité de ‘Essav !

Le peuple juif a traversé la période où « ‘Essav avait pris Ya’akov en haine… » et où il disait dans son coeur « … je tuerai Ya’akov, mon frère » (Genèse 27, 41), le temps où Lavane le trompait, abusait de lui et voulait sa perte : «L’Araméen voulait faire disparaître mon père » (Deutéronome 26, 5).

Le peuple d’Israël a subi l’oppression romaine, les persécutions du Moyen Age et nous pouvons dire qu’en général, à l’instar de notre Patriarche : «J’ai observé les six cent treize commandements et je n’ai pas appris de ses mauvaises actions». Cependant, depuis l’ère de l’émancipation, notre peuple affronte l’épreuve la plus dangereuse : celle de la liberté et de la fraternité avec les nations qui veulent le détacher de son D.ieu. Les portes des ghettos et des mellahs se sont ouvertes et les pertes ont été effroyables. L’identité de notre peuple qui témoigne de l’existence de D.ieu sur terre et de la véracité de Sa loi est en jeu ! Bien qu’au bout du compte, « ton nom sera Israël » et que le Tout-Puissant nous aidera à triompher, notre rôle à nous est de lutter, d’être les artisans de cette victoire.

Aux descendants de ‘Essav qui cherchent à nous attirer à eux en nous suggérant :

«Voyageons et allons côte à côte, unissons nos idéaux, tâchons de nous ressembler, vivons en frères », nous répondons comme Ya’akov : «Les enfants sont délicats… moi, je voyagerai lentement, à mon allure» (Genèse 33, 12-14). Si les parents ont su préserver leur identité juive, les enfants sont les plus menacés par la proposition de ‘Essav ils sont « délicats », vulnérables.

Veillons à leur inculquer les valeurs qui nous différencient des autres peuples et à les armer contre l’assimilation et la fusion avec le milieu ambiant. C’est ainsi que nous triompherons de cette terrible épreuve pour arriver, sains et saufs, au but final, « au lever de l’aube», à l’époque messianique : «jusqu’à ce que j’arrive chez mon maître, à Séïr» répondit Ya’akov à la proposition de ‘Essav. C’est seulement à ce moment, explique Rachi, que nous rejoindrons ‘Essav, comme le dit le prophète: « Et les sauveurs monteront sur la montagne de Sion pour juger la montagne de ‘Essav, et la royauté appartiendra à D.ieu ! (Ovadia 1, 21)

(adapté à partir de Imré Cohen)

echelle

PARACHAT VAYETSE 5775

L’échelle de la vie

Il (Yaakov) eut un rêve que voici : Une échelle était dressée sur la terre, son sommet atteignait le ciel, et des anges divins montaient et descendaient le long de cette échelle.

(Genèse 18, 12)

Yaakov part pour ‘Haran, sur l’ordre de ses parents pour prendre une épouse parmi les filles de son oncle Lavane. Ayant fait halte en chemin, il s’endort et fait un rêve lourd de sens : Il y voit une échelle, dont le sommet atteint le ciel et sur laquelle montent et descendent des Anges célestes.

Quelle est la signification d’un tel rêve à un moment où Yaakov se trouve à la croisée des chemins ? Yaakov quitte le pays de Canaan, sa famille, son milieu et ses habitudes pour s’engager dans une voie nouvelle, tout à fait différente de celle qu’il a connue jusqu’à présent. Il va fonder un foyer, élever des enfants, travailler et vivre auprès de son beau-père, rencontrer Êssav son frère, autant d’épreuves qui exigent une force de caractère peu commune. La vie se présente à Yaakov comme une échelle, qu’il peut gravir ou descendre, à sa guise, et selon ses forces. S’il est en mesure de surmonter les difficultés et les tentations avec la force morale requise, il connaîtra l’ascension spirituelle mais si, au contraire, il se montre trop faible, il risque la déchéance.

C’est ainsi que doit être envisagée toute épreuve morale, toute expérience humaine, toute vie : dans le sens d’une descente ou d’une montée. Dans le premier cas, c’est la chute morale, la perte des valeurs. Dans le second cas, c’est l’élévation spirituelle, la progression dans les valeurs morales de sainteté, de pureté et d’attachement à D.ieu. L’homme, quel qu’il soit, risque, à tout moment au cours de son ascension, de trébucher et de tomber, et cela même s’il est parvenu à la perfection spirituelle du Juste.

Dans notre texte, Yaakov nous est présenté comme un juste, un fait qui est confirmé à deux reprises par le commentaire de nos Sages : Tout d’abord au verset 10, à propos de son départ de Béer Chéva, Rachi rapporte : Dans quel but nous parler de son départ ? C’est pour nous dire que le départ d’un tsadik, d’un Juste, fait impression dans la ville. Tant que le Juste est dans la ville, c’est lui qui est sa beauté, c’est lui qui est son éclat, c’est lui qui est sa majesté…. Au verset 17 : Le Saint béni soit Son Nom a dit : « Ce tsadik ce Juste viendrait dans Ma demeure et s’en irait sans y passer la nuit ! » C’est D.ieu Lui-même qui confère à Yaakov le titre de tsadik. Mais l’homme, lui, n’aura jamais, à aucun moment de sa vie, la certitude de sa perfection morale, de son «succès» spirituel : Dieu seul peut juger et trancher.

Yaakov a compris le sens du message qui lui est adressé dans le songe de l’échelle. Il sait qu’il va devoir affronter maintes difficultés et surtout se mesurer à un ordre de choses tout à fait nouveau. Aussi, avant d’arriver à ‘Haran, il fait un détour par la Yéchiva de ‘Ever : il y passe quatorze années entières à étudier la Torah et y puise les forces spirituelles nécessaires pour affronter Lavane, puis, plus tard, son frère Êssav. Les richesses spirituelles qu’il a acquises durant ces intenses années d’étude lui seront également essentielles pour établir son foyer et élever ses nombreux enfants dans ce milieu hostile qu’est la maison de Lavane.

Yaakov s’est fixé encore un signe, un point de repère pour ne jamais trébucher sur cette voie semée d’embûches : Il se promet de ne jamais oublier le sens véritable des événements et de toujours voir en toutes choses la marque de la Providence Divine. Yaakov prononça un voeu en ces termes : si D.ieu est avec moi, et qu’il me protège dans la voie où je marche, s’il me donne du pain à manger et des vêtements pour me couvrir, si je retourne en paix à la maison de mon père, et que l’Eternel soit pour moi D.ieu, alors, cette pierre que je viens d’ériger en monument deviendra la maison de D.ieu et, tous les biens que Tu m’accorderas, je veux T’en offrir la dîme. (ibid. 20)

Est-ce là, tout le sacrifice que Yaakov est prêt à faire ? Est-ce tout, ce qu’il est prêt à payer en retour de tous les bienfaits, qu’il souhaite recevoir de D.ieu ? Cela s’appelle-t-il de la générosité ? Alors qu’il est en proie au dénuement le plus total, au plus profond de la détresse, il se tourne vers D.ieu pour Lui demander de l’aider. Et que Lui promet-il en retour ? La dîme ! Un dixième de ce qu’il recevra ! Imaginerions-nous une personne, démunie de tout, qui solliciterait l’aumône, et exprimerait sa grandeur d’âme en suppliant son bienfaiteur : «Accorde-moi un million d’euros ! En reconnaissance, je te donnerai cent mille !»

Très souvent, les hommes sont tellement convaincus que tous leurs biens, leurs acquisitions et leurs réussites matérielles sont le fruit de leurs efforts personnels, de leur intelligence supérieure, de leur zèle et de leur sens inné des affaires qu’ils finissent par avoir le sentiment inébranlable de leur maîtrise et de leur supériorité… au point d’oublier le principal instigateur de toutes choses, le Maître du monde. Ils sont sûrs en leur for intérieur que : C’est ma propre force, c’est le pouvoir de mon bras qui m’a valu cette richesse (Deutéronome 8, 17). Mais la Torah met en garde énergiquement contre une telle attitude : Garde-toi d’oublier l’Eternel, ton D.ieu, de négliger Ses préceptes, Ses institutions et Ses lois… (ibid. 8, 11).

Aux yeux de Yaakov, telle ou telle somme d’argent n’a pas d’intérêt. Sa pensée est beaucoup plus profonde et se situe à un autre niveau : donner la dîme n’est ni une expression de générosité, ni de reconnaissance. La somme n’a ici aucune importance. Ce qu’il veut affirmer, c’est l’idée de la suprématie divine sur toute chose, sur tout bien, sur tout événement : je suis conscient que Tu es Celui qui donnes ; tout ce que j’ai, me vient de Toi seul ; rien n’est dû à mon pouvoir ou à mes capacités personnelles. Ce sont là les pensées de Yaakov en ce moment de profonde détresse. A cet instant même il prend la ferme décision de demeurer en communion avec D.ieu, malgré tout, et de donner la dîme de tout ce qu’il gagnera. Yaakov exprime ainsi sa foi inébranlable envers D.ieu.

Cela nous conduit à la conclusion que J’homme doit à tout moment s’en remettre totalement à D.ieu. De ce fait, tous les soucis quotidiens s’effacent, et les angoisses s’envolent. Un petit morceau de pain trouvé au bon moment, un vêtement cousu à point nommé sont autant de signes de la Providence Divine. Mal interprétés, ils peuvent conduire, qu’à D.ieu ne plaise, à l’hérésie.

Mais, s’ils sont lus correctement, ils révéleront la présence du divin dans le quotidien le plus banal.

Fidèle à cette voie, Yaakov a réussi à insuffler sa foi sans faille, à ses épouses. Celles-ci ont su donner à leurs enfants des noms qui rappelaient la manifestation de la Main Divine au cours de leurs expériences douloureuses. La signification littérale de chaque nom correspond à l’événement vécu. Réouven : D.ieu a vu mon humiliation ; Chim’one : D.ieu a entendu que fêtais dédaignée. Lévi : Désormais mon époux me sera attaché. Quelle est la femme qui accepterait de perpétuer son humiliation à travers le nom de son fils ? Léa nous en a donné la leçon. Ra’hel a, elle aussi, donné des noms chargés de signification Yossef : D.ieu a effacé ma honte. D.ieu est perçu à chacune de leurs pensées. La naissance d’un enfant devient l’occasion d’y voir un don de l’Eternel, de s’en réjouir et d’en remercier le Créateur. Or, cela aurait pu être l’occasion de descendre les échelons de l’échelle si on ne percevait dans cet événement qu’un simple phénomène naturel permettant de perpétuer l’espèce ou d’assurer la continuité de l’affaire familiale.

Un autre épisode magnifique se trouve à la fin de notre section. Lavane s’est lancé à la poursuite de Yaakov. Il fouille dans tous ses effets pour trouver les objets dérobés. Quelle humiliation ! Il ne trouve rien. Yaakov devrait saisir l’occasion de se mettre en colère et de reprocher vivement à Lavane sa conduite ridicule ! Or, que nous révèlent nos Sages ? La colère des ancêtres a plus de valeur que la modestie des enfants. Où voyons-nous la colère des ancêtres ? Yaakov s’emporta et se plaignit à Lavane (Genèse, 35) : Croyez-vous qu’il y ait eu là des échanges de coups et de blessures ? Au contraire, Yaakov apaise la colère de Lavane : «Quel est mon crime, quelle est ma faute pour que tu t’acharnes contre moi ? Après avoir fouillé dans toutes mes affaires, qu’as-tu découvert qui appartienne à ta maison ?

Yaakov, dont la colère est justifiée, s’excuse auprès de Lavane et cherche à gagner son coeur. Nos Sages ont exalté la colère de Yaakov. Ils ont approuvé l’ancêtre Yaakov qui est fidèle à l’enseignement reçu au cours du «songe de l’échelle».

Yaakov a appris à dominer ses sens ; il en est le maître. Il voit dans chaque événement la main de D.ieu. Il s’élève de degré en degré, dans la foi en D.ieu, jusqu’à la communion parfaite. Dans l’échelle de la vie, il a choisi un seul sens : Celui de l’ascension. C’est la fonction que remplit l’échelle dans son songe. Il nous a enseigné comment emprunter l’échelle de la vie.

 

(adapté à partir des Lectures Chabbatiques)

jumeaux

Paracha Toldot 5775

Surmonter les épreuves

Esau prit Jacob en haine, à cause de la bénédiction dont son père l’avait béni. Et Esau se dit en lui-même : « Le temps du deuil de mon père approche. Je tuerai Jacob mon frère».

Le Midrach rapporte : les méchants sont tributaires de leur coeur, tel qu’il est dit : Esau se dit en son cœur (ici), Bilaam se dit en son coeur (Nombres), l’insensé se dit en son coeur (Psaume 14). Par contre, les sages sont maîtres de leur coeur, tel qu’il est dit : David dit à son cœur, ‘Hanna parlait à son coeur, et cela à l’exemple du Créateur. Et D.ieu dit à Son coeur.

Dans ce texte, l’expression hébraïque pour désigner la pensée intérieure est comprise par nos Sages comme une expression de l’identité de la personne qui pense. « Se dire en son coeur » signifie – écouter son coeur, se soumettre aux désirs de son coeur, de ses sentiments. Cela désigne le mode de pensée des mécréants. Par contre, « dire à son coeur », c’est maîtriser ses sentiments, faire triompher la raison sur le cœur : cela caractérise les sages. D’autant plus que la même expression est utilisée en parlant du Créateur.

Esau est classé ici dans la catégorie de ceux qui se laissent gouverner par leur coeur : ce son les impies. Pourquoi? Quels signes de méchanceté apparaissent-ils dans sa conduite? Esau ne mérite-t-il pas plutôt toute notre indulgence? C’est un homme qui a tout perdu dans la vie, brusquement et contre toute raison apparemment valable. A ses yeux, son frère Yaakov a usurpé le droit d’aînesse, et par conséquent, la bénédiction paternelle. Qu’aurions-nous fait à sa place ? Il fait preuve d’un grand courage et maîtrise son désir de vengeance jusqu’au deuil de son père. Qui est capable d’une telle maîtrise de soi? Est-il facile de se contenir de la sorte, si importante que soit la mitsva du respect des parents? Esau écoute la voix de son coeur et calme sa haine pour ne pas peiner son père. Est-ce là de la méchanceté? Est-ce là une raison pour le condamner à figurer parmi les impies?

Nos Sages ont une conception du comportement humain bien différente de la nôtre. Pour nous, un homme qui lutte et arrive à maîtriser ses mauvais penchants, à dominer ses tendances à la jalousie, à la haine, à la vengeance, est un homme qui sort de l’ordinaire, différent du commun des mortels. Nous dirons qu’il est un saint, qu’il fait plus que son devoir. Pourquoi pensons-nous ainsi? C’est parce que nous évoluons dans une société où les critères de conduite « normale » sont ceux qui sont dictés par le sentiment et non par la raison. La jalousie, l’instinct corporel et la course aux honneurs sont les bases de la réalité sociale. Toute conduite opposée à cette ligne est jugée comme une conduite de sainteté qui ne relève pas de la réalité de notre époque ni de notre société. Notre société est fondée sur la poursuite de biens matériels, animée de luttes sanglantes pour obtenir tout ce que le corps désire au détriment des principes de raison et de morale qui apparaissent certainement au cours de discours, et aux dissertations morales, sans jamais se traduire dans les faits. Tout comportement conforme aux principes moraux est l’apanage de personnes sages, illustres et rares.

C’est là que réside notre erreur. La Torah nous enseigne qu’il n’y a pas de vie possible si l’homme au moment de l’épreuve, ne manifeste pas ce qui le différencie de l’animal, s’il ne justifie pas le but de sa création, de sa venue au monde. L’homme peut disserter longuement sur le caractère nuisible de la colère mais s’il ne se maîtrise pas au moment où il a une raison quelconque de se mettre en colère, quel intérêt présente sa dissertation? De même, l’homme apparaît dans conduite quotidienne sous des dehors polis, voire nobles, mais quand il est aux prises avec la haine, le désir vengeance, il se laisse emporter par les penchants de cœur et devient méconnaissable. Ce n’est plus l’homme que tous connaissent, que tous honorent et respectent perd brusquement l’image de D.ieu, et ses réactions sont semblables à celles des animaux. Dominer ses mauvais penchants n’est pas l’apanage des justes, des saints : C’est le devoir impératif de tout être humain, du commun des mortels.

Il y a balance et balance. La balance qui pèse les actes de l’homme doit être plus exacte et plus délicate que celle du pharmacien. Une erreur infime peut exprimer des écarts inquiétants. Un homme pourrait croire qu’il est droit, intègre, sans reproches. Cette balance pourrait lui prouver qu’il est un criminel. Ainsi en est-il d’Esau. En apparence, il fait preuve de grandeur : il se retient de tuer son frère Yaakov sur le champ.

En réalité, son comportement n’a pas pour origine une motivation innocente pour diverses raisons : tout d’abord, Yaakov s’est sauvé. De plus, Esau a envoyé à ses trousses son fils Elifaz avec pour mission de supprimer l’oncle Yaakov.

Rivka a bien spécifié à Yaakov en lui recommandant de fuir le toit familial : Jusqu’à ce que ta colère de ton frère soit calmée. Il y a donc colère. Esau n’a donc pas maîtrisé sa colère, il est tributaire de ses penchants. Il attend le moment propice pour mettre ses desseins à exécution. L’apparence de maîtrise de sa colère n’est qu’une sombre machination. Il a peur d’éveiller la colère de son père, car il mesure la gravité de ses conséquences éventuelles. Après une analyse profonde, il s’avère donc que ce que nous avions cru être la grandeur d’ Esau, n’est que l’expression d’une nature corrompue à sa base. Notre aïeule Rivka l’a bien compris; et elle n’a pas trouvé d’autre solution que de conseiller à son fils Yaakov de fuir; pour échapper à un meurtre certain dont l’auteur ne serait l’auteur que Esau.

Le caractère d’ Esau a été ainsi défini par le prophète Amos : Parce qu’il a poursuivi son frère avec t’épée, étouffant toute pitié, parce que sa colère ne cesse de faire des victimes, et qu’il se complait dans une haine sans fin (Amos 1,11).

L’homme a le devoir de procéder à une introspection sévère afin d’être conscient de l’existence de ses penchants et du danger qu’ils recèlent, même s’il n’est pas en mesure de les maîtriser. Cela lui permettra d’être capable d’éviter l’embûche sur laquelle il avait trébuché. C’est en tirant la leçon des échecs du présent, qu’il s’acheminera vers la perfection humaine, qui ne s’acquiert qu’en surmontant toute épreuve. Il faut réussir à affirmer sa maîtrise sur son coeur, à faire triompher la raison sur le sentiment.

(adapté à partir de Ethique et Pratique dans le Pentateuque)

colombe

Paracha Hayé Sarah 5775

Il fit s’agenouiller les chameaux hors de la ville près de la fontaine.

(Genèse 24, 11)

 La Bible nous trace, à plusieurs reprises, le tableau poétique des mariages conclus « au bord d’un puits ». Nous connaissons, en dehors de l’exemple de Isaac et Rébecca, celui de Jacob et Rachel et celui de Moïse et Tsippora.

La Torah veut, ce faisant, nous représenter l’eau de la terre comme le symbole de la pureté et le signe de la fécondité. « Et le souffle de Dieu planait sur la face des eaux» (Genèse 1, 2). La femme juive se sent attirée vers l’eau naturelle qui constitue la source de pureté dans sa vie conjugale, et, réciproquement, les eaux pures qui jaillissent du sol, montent à la rencontre de la femme qui incarne en elle l’idéal de pureté et de chasteté (Cf. Genèse. Raba c. 60 : les eaux du puits montèrent vers Rébecca).

Les mariages au bord du puits symbolisent ainsi l’idée de pureté qui doit former la base de toute la vie conjugale.

 

Isaac conduisit Rebecca vers la tente de Sarah sa mère. Il prit Rebecca pour femme et il l’aima.

(Genèse 24, 11)

 Voici encore un trait fondamental, qui n’a point disparu chez les descendants d’Abraham. Plus longtemps elle fut son épouse, plus il l’aima. Tout comme ce mariage du premier fils du peuple juif, la plupart des mariages juifs se concluent sur la base de la raison et non sur celle de la passion momentanée. Les parents et les membres de la parenté se consultent pour savoir si les jeunes gens sont bien assortis : aussi l’amour va-t-il en s’approfondissant dans la mesure où ils se connaissent davan­tage. Contrairement à la règle ordinaire des mariages dans la société moderne, où seuls les sentiments d’amour précèdent le mariage, quitte à faire place ensuite aux plus graves déceptions l’union de Rébecca et d’Isaac ne reposa pas sur le mobile initial de l’amour.

Ils s’unirent dans une même volonté et se joignirent pour une même œuvre : la continuation de la maison d’Abraham. Et c’est alors seulement, après qu’Isaac l’eût prise comme femme. « qu’il l’aima ». Ainsi, l’amour représente l’aboutissement de l’expérience commune. Loin d’être le suprême but, le mariage n’est que le début d’une vie en commun qui donnera à l’amour un sens toujours plus profond et plus authentique (S.R. Hirsch)

Aussi longtemps que Sarah vivait, remarque Rachi une lumière était allumée d’une veille de Chabbat à l’autre veille de Chabbat, la bénédiction était dans la pâte (qu’elle pétrissait), une nuée était fixée au-dessus de la tente. Quand Sarah est morte, tout a cessé. Et quand Rébecca est venue, tout a repris.

Ces trois symptômes particuliers de la tente de Sarah correspondent aux trois principaux devoirs de la femme juive : celui d’allumer les lumières du Chabbat, celui de prélever la ‘Hala de la pâte, ce qui lui assure la bénédiction d’en haut. Enfin le devoir d’observance des lois de pureté de la vie conjugale. Elles attirent sur le foyer la présence et la protection de la majesté divine qui y plane invisiblement comme dans une colonne de «nuée fixée au-dessus de la tente».

(adapté à partir de La Voix de la Torah)

vayera

Parachat Vayéra 5775

   LA CIRCONCISION OU LA SPECIFICITE DE LA MISSION  D’ISRAËL

« Et D.ieu lui apparut [à Abraham] dans les plaines de Mamré… »

(Genèse 18, 1)

Rachi explique : «C’est lui, [ce même Mamré] qui avait donné conseil à Abraham [d’accomplir] la brit mila, la circoncision, et c’est pourquoi D.ieu apparut au patriarche dans son domaine. »

Pourquoi Abraham, avant la mila, éprouva-t-il le besoin de prendre conseil auprès de Mamré alors qu’il avait déjà reçu du Tout-Puissant l’ordre explicite d’accomplir cette mitsva ?

De fait, la circoncision allait marquer un véritable tournant dans l’existence du patriarche.

Le Midrach nous rapporte succinctement le dilemme auquel Abraham était confronté : « Tant que je n’ai pas pratiqué la circoncision dans ma chair, les hommes de tous les milieux entrent et sortent chez • moi, dit-il à D.ieu. Après la circoncision, tout le monde se détournera de moi. A cela, D.ieu répondit :

« A présent, c’est Moi et Ma suite qui viendrons te rendre visite ».

Depuis le début de son existence, Abraham s’était lancé seul et avec générosité dans la lutte pour faire connaître l’existence du D.ieu Unique à l’humanité idolâtre. Pour mener à bien sa mission, il s’était exilé, parcourant le pays en tous sens pour apporter la bonne parole à tous, sans exception. Il avait trouvé la compagne qui partageait ses idées et qui, de son côté, s’attachait à répandre parmi les femmes l’idéal monothéiste destiné à changer la face du monde.

« Abraham convertissait les hommes et Sarah convertissait les femmes » nous enseigne Rachi. Or, l’action d’Abraham était avant tout axée sur la bonté et la bienfaisance. Cela signifie qu’il était l’exemple vivant du dévouement total à autrui. Il s’efforçait d’aller au-devant des désirs de son prochain, de déceler tous ses besoins spirituels et matériels et de les satisfaire pleinement. De ce fait, il jouissait d’une immense popularité dans tout le pays. Et voilà que D.ieu lui demande de franchir une nouvelle étape dans sa mission : accomplir la circoncision.

La circoncision c’est par excellence l’accomplissement de la mitsva, d’un commandement de D.ieu dont la portée éthique et rationnelle nous échappe souvent. Cependant, nous l’observons avec la certitude, qu’émanant de D.ieu, cet ordre constitue nécessairement le Bien. Or Abraham est parfaitement conscient du fait qu’en pénétrant, par la circoncision, dans la sphère apparemment « irrationnelle » de la pratique religieuse, il prend le risque de se couper des disciples qu’il a formés. Du reste, le Midrach rapporte qu’effectivement, D.ieu accorda une protection particulière à Abraham qui réalisa la circoncision en « plein jour », au vu et au su de tous. Elle fut accomplie devant des personnes prêtes à s’opposer par la force à l’accomplissement de l’ordre du Très-Haut.

N’est-il pas singulier que nous soyons, nous Juifs, désignés par la Torah comme les descendants d’Isaac ainsi qu’il est dit : « Car c’est par Isaac que s’appellera ta descendance»? A la différence de tous les disciples d’Abraham et de Ismaël, Isaac est, par excellence, l’héritier spirituel d’Abraham « post-mila ». Cet héritage du premier Patriarche, ne saurait être simplement conçu comme la transmission des larges idées humanitaires et des principes monothéistes répandus par Abraham à travers le monde. Pour nous, éthique et pratique religieuse forment un Tout indivisible.

Quitte à nous heurter à l’incompréhension momentanée d’un monde enfermé dans un rationalisme étroit, nous sommes conscients que le message de D.ieu assumé dans son intégralité par le peuple d’Israël, sera un jour la Charte de l’Humanité.

(adapté à partir de IMRE COHEN)

 

constellation

Parachat Lekh Lekha 5775

Après ces faits, la parole du D.ieu s’adressa à Abram, dans une vision, en ces termes : « Ne crains point, Abram : je suis un bouclier pour toi. Ta récompense sera très grande ! »

Abram répondit : « Seigneur Eternel, que me donnerais-tu, alors que je m’en vais sans postérité, et que l’intendant de ma maison est Eliézer de Damas?

Et Abram dit: Voici, tu ne m’as pas donné de postérité, et voilà que l’enfant de ma maison sera mon héri tier. »

Mais voici que la parole de l’Éternel vint à lui, disant : « Celui-ci n’héritera pas de toi ; mais celui qui sortira de tes entrailles celui-là sera ton héritier. »

II le fit sortir dehors, et dit : « Regarde le ciel et compte les étoiles, si tu peux en supputer le nombre ; et il lui dit, ainsi sera ta descen­dance. »

Et il eut foi en l’Éternel, et l’Éternel lui en fit un mérite.

 

« IL LE FIT SORTIR DEHORS. » Sens littéral : Il le fit sortir hors de sa tente pour voir les étoiles.

Rachi, en citant tout d’abord le sens littéral semble vouloir
appuyer la thèse qui considère les événements nommés ici comme des faits réels et non pas comme des fictions faisant partie de la vision du Patriarche, comme le conçoivent Nahmanide (v. 12) et Maïmonide (Guide II, 46)

La discussion sur ce point se poursuit chez plusieurs auteurs et Rabbi Samuel Edels( MAHARCHA) remarque que l’interprétation midrachique a son origine dans la difficulté du sens littéral (Chabbat 156 a).

Le Midrach, cité également par Rachi, interprète le verset comme suit : Sors de ton destin tel qu’il est inscrit dans les étoiles. Tu as vu dans les astres que tu n’aurais pas d’enfant. En effet, Abram ne doit pas avoir d’enfant Abraham aura un fils, Saraï n’aura pas d’enfant, Sarah en aura. Je vous donne un nom différent et votre destinée sera différente.

La source talmudique de ce Midrach (Chabbat ib.) formule la conclusion de cette leçon en ces termes : Israël n’est soumis ni aux astres ni aux signes du Zodiaque.

La doctrine du judaïsme enseigne que le déterminisme du destin « inscrit dans les étoiles » n’est pas sans appel. Il existe d’ultimes moyens d’action capables d’influer sur le cours des destinées humaines.

Ce sont avant tout le retour vers Dieu (techouva), la prière (tefila) et la charité (tsedaka). Le changement de nom, et le changement de lieu, sont les indices extérieurs d’un changement profond se produisant dans l’existence humaine (Roch Hachana 16 b.). Alors que les idolâtres et d’autres systèmes croient aveuglément en la prédes­tination, telle qu’elle est inscrite dans l’horoscope, et la tiennent pour absolu­ment irrévocable, l’homme juif doit savoir, s’entend dire Abraham, qu’il possède la capacité de « sortir hors de son destin astrologique » et de le dominer grâce aux moyens indiqués.

Cependant, ces facteurs de mérite personnel interviennent seulement dans le cours des destinées de l’individu, non dans celles de l’ensemble de la nation d’Israël. Rabbi Samuel Edels, se référant aux explications de nos Sages, montre que ses destinées nationales dépendent de critères différents. Rachi y fait allusion dans sa troisième explication de notre verset : « Dieu fait sortir Abraham du globe du monde et l’emporte au-dessus des étoiles. C’est pourquoi le texte emploie le verbe  »habet » qui signifie (en général) regarder d’en haut vers le bas ».

Le sens figuré du verset nous laisse ainsi entendre que la postérité d’Abraham se situera sur un plan supérieur au niveau terrestre et matériel. En effet, alors que les destinées des autres nations sont commandées par les contingences naturelles, physiques, sociales et économiques, l’histoire d’Israël est celle de l’esprit.

La grandeur et la décadence d’Israël suivent la courbe ascendante ou fléchissante de sa force morale et spirituelle. Contrairement aux autres nations, Israël peut atteindre un degré de sanctification où l’esprit, dominant la matière, est assez fort à lui seul pour animer de son souffle le corps national et lui assurer, avec un minimum de moyens naturels, la vie éternelle. Il peut poursuivre son existence durant des millénaires sans pays, sans gouvernement et sans langue commune, uniquement par la force de l’esprit. Ses destinées nationales sont la manifestation éclatante de la réalité de l’ordre surnaturel et divin et de l’existence du miracle dans la vie terrestre.

ET COMPTE LES ETOILES. Les étoiles du ciel et le sable de la mer sont les deux métaphores employées par D.ieu dans son annonce à Abraham: Telle sera ta postérité. Cependant, ces deux images représentent des extrêmes opposés. Les innombrables étoiles brillent au firmament dans l’immensité de l’espace, et le sable de la mer est foulé au pied par tout un chacun.

Cette double appréciation comprend une caracté­ristique du peuple d’Israël, peuple à la nuque raide, obstiné et volontaire, pour le bien comme pour le mal, tel qu’il se montrera tout au long de son histoire. Israël ne connaîtra presque jamais une existence bourgeoise, paisible ou uniforme. Son ascen­sion sera vertigineuse comme sa chute sera profonde. Soumis et vaincu, Israël éprou­vera des souffrances qu’aucun autre peuple ne connaîtra jamais, mais victorieux, triomphant, ayant repris le chemin qui le mène à l’avant-garde, Israël atteindra des hauteurs insoupçonnées. « Lorsqu’ Israël monte, il s’élève jusqu’aux étoiles et lorsqu’il chute, il tombe jusqu’au sable de la mer » (Esther Rachi 6, 13).

A chacun de nous par sa conduite responsable, de donner cette force à tout le peuple afin qu’il s’élève jusqu’aux étoiles.

(d’après la Voix de la Torah)

erets israel

Béréchit

Nous sommes a priori étonnés du premier commentaire de Rachi, commentateur universel de la Torah et origine de Troyes, sur le premier livre de la Torah Berechit ou la Genèse. Contrairement à son habitude d’expliquer le texte le plus près du sens littéral, Rachi commence par nous citer un midrach Tan’houma que voici : « Rabbi Yits’hak dit : La Torah aurait dû commencer (au chapitre 12 de l’Exode) : « Ce mois-ci est pour vous le premier des mois », puisque c’est la première mitsva prescrite au peuple d’Israël. Pourquoi débuter avec Berechit ? (Nous en trouvons l’explication dans les Psaumes) : D.ieu fait connaître à son peuple la puissance de Ses oeuvres, afin de lui donner l’héritage des nations. Si les peuples du monde venaient à dire à Israël : Vous êtes des voleurs, c’est par la violence que vous avez conquis les terres des sept nations, on leur répondrait: Toute la terre appartient au Saint béni soit-Il. C’est Lui qui l’a créée et Il l’a donnée à qui bon Lui semble. Par un acte de Sa volonté; Il l’a donnée à ces peuples, et par un acte de Sa volonté, Il l’a reprise pour nous la donner à nous. »

D’autre part la Torah vient-elle nous raconter l’histoire du monde ? De plus les nations oseraient-ils traiter Israël de voleurs ? Seraient-ils sensibles à la réponse que leur fournirait Israël ?

La réponse à toutes ces questions est la suivante. D.ieu béni soit-Il scrute le temps au travers des nombreuses générations à venir, et voit de loin, le jour les nations contesteront au peuple d’Israël le droit de vivre sur sa terre ancestrale.

De plus, Rachi ne vécut-il pas les atrocités commises par les croisades contre les communautés juives françaises et autres, mettant à feu et à sang toute trace de sang juif, brûlant sur leur passage toutes les synagogues et maisons d’études en envoyant au bûcher leurs fidèles et leurs sages ? N’était-il pas témoin lui-même de la volonté de ces mêmes croisades de conquérir la terre d’Israël et surtout Jérusalem ?

Rachi témoin de ces pogroms répétés, s’est vu contraint dans ces conditions de commencer le commentaire de la Torah en expliquant le choix de D.ieu saint béni soit-Il, d’octroyer la terre d’Israël aux descendants d’Abraham Isaac et Jacob.

Rachi d’ailleurs continue son commentaire en expliquant le mot rechit (commencement) : « Le monde a été créé pour la Torah que l’Ecriture appelle le commencement de Sa voie (Proverbes 8, 22), et pour le peuple d’Israël que l’Ecriture appelle le commencement de sa moisson (Jérémie 2,3). »

Notre devoir est de nous pencher vers ce début historique de la Torah et comprendre que la Torah n’est pas un livre d’histoire mais une Torah vivante qui fut le seul compagnon du peuple d’Israël pendant près de deux millénaires d’exil, parsemés d’atrocités barbares de tout genre et de toute origine. C’est cette même Torah qui justifie pleinement le droit du peuple d’Israël à vivre sur sa terre ancestrale.

Quiconque s’exclurait de la foi en D.ieu et de la Torah, s’exclurait de fait du droit à vivre et à se réclamer de la terre d’Israël.

teva noa'h

Noa’h

Ceci est l’histoire de Noa’h. Noa’h fut un homme juste, parfait dans ses générations: il marchait avec D.ieu.

(Genèse 6, 9)

 »Parfait dans ses générations »: Celles qui précédèrent et celles qui suivirent le déluge. Cette indication du texte est-elle restrictive de l’éloge fait à Noa’h ?

Nos Maîtres en ont discuté et Rachi rapporte l’opinion favorable d’après laquelle Noa’h fut un juste même à son époque dépravée et l’opinion péjorative qui considère Noa’h comme un juste, mais relativement à son époque immorale. Cependant, les deux opinions peuvent être valables toutes les deux.

Le combat que Noa’h eut à livrer peut, en effet, laisser quelques empreintes sur la force de caractère. Mais une conduite morale et irréprochable à une telle époque pèse bien plus lourd dans la balance divine que celle, même plus parfaite réalisée en des meilleures conditions. L’expression : Noa’h marchait avec D.ieu, qui complète la caractéristique, sous-entend également une légère critique que Rachi formule ainsi: «Tandis que pour Abraham on dit: Marche devant Moi (16, 1). Noa’h avait besoin d’un appui pour le soutenir, Abraham était assez fort et marchait dans sa piété de lui-même ».

La tradition se demande pourquoi Noa’h, qui fut pourtant couvert d’éloges par la Torah et qui inaugura un nouveau monde, ne put devenir un Abraham et être, à partir de la renaissance de l’humanité, le grand prophète de la croyance monothéiste. Les observations précédentes ont déjà répondu en partie à cette question. Mais les Sages remarquent, en outre, que Noa’h ne sut pas lutter avec une énergie suffisante contre le courant d’immoralité de son époque. Il ne sut pas convaincre ses contem­porains, comme Abraham sut le faire. Il n’intercéda pas auprès de l’Eternel en faveur de sa génération comme Abraham le fit en faveur des habitants de Sodome. Enfin, il accepta d’être sauvé seul de la mort, lui et sa famille, tandis que Moïse, entendant l’Eternel menacer Israël d’anéantissement pour faire de lui « un grand peuple », se récria immédiatement : « O ! Pardonne leur faute ! Sinon, efface-moi du livre que tu as écrit» (Exode 32, 32). Il ne voulut en aucun cas survivre à son peuple et préféra partager son sort (Midrach et Zohar). Bref, Noa’h était l’homme qui s’enferma dans son « arche », demeurant un juste pour lui et les siens, laissant les autres à leur destin.

Certes, répondent ceux de « nos Sages qui jugent Noa’h du côté favorable » (Rachi), Noa’h ne cessa pendant les cent vingt ans que dura la construction de l’Arche de répri­mander, d’avertir et d’éclairer ses contemporains (Rachi 6, 14), en vue de les inciter à la pénitence. Il ne craignit pas d’essuyer leurs sarcasmes, leurs propos malveillants, menaçants et injurieux. Mais il s’imposa néanmoins une certaine réserve à leur égard et jugea opportun de garder ses distances afin de ne pas risquer de subir lui-même une influence néfaste dans sa fidélité à D.ieu. Il alla même jusqu’à s’abstenir de fonder une famille avant l’âge de 500 ans, alors que tous ses ancêtres et contemporains étaient devenus pères de famille beaucoup plus tôt. Il craignait de mettre au monde des enfants au milieu d’une société complètement pervertie et de ne pas avoir la possibilité de leur donner une éducation morale et saine. Ce ne fut que 20 ans après la proclamation de l’anéantissement définitif et après s’être exercé pendant 500 ans à « marcher avec D.ieu », seul et sans famille, qu’il eut le courage d’être père, après que Dieu lui eut fait comprendre que la perpétuation de la race humaine lui incom­berait.

Ainsi, quelles que soient les critiques qui lui furent adressées, la Torah, en décernant à Noa’h le titre d’honneur de tsadik, approuve la conduite de cet homme, qui, exposé à la pire catastrophe que l’humanité ait connue, fut trouvé digne de sauver le genre humain. On a reproché à Noa’h de n’avoir pas imploré D.ieu de sauver sa génération comme le fit Abraham à propos des habitants de Sodome, mais il trouve sa justification dans le fait que le nombre des justes de son époque n’atteignait pas la dizaine. Noa’h et sa famille qui survécurent dans l’arche n’étaient que huit personnes. Or tout comme Abraham, Noa’h savait que le minimum de dix justes est requis en pareil cas.   (texte adapté a partir de la Voix de la Torah )

 

A nous de choisir notre modèle Noa’h ou Abraham. Dans l’impossibilité de le faire pour des raisons diverses, soutenons activement ceux qui ont choisi le modèle d’ Abraham en diffusant le message universel de la Torah.

respiration

Ki Tavo 5774 – Remercier D.ieu pour chaque respiration

Lorsque tu seras arrivé dans le pays qu’Hachem ton D.ieu te donne en héritage, que tu l’auras occupé et que tu t’y seras établi, tu prendras les prémices de tous les fruits de la terre que tu auras récoltés du sol qu’Hachem ton D.ieu aura choisi pour y faire résider Son nom.

(Dévarim 26, 1-2)

Maimonide explique a propos de cette mitsva: «Les prémices du blé, du vin, de l’huile, de la pâte, celles des fruits, et de la toison des brebis sont autant de pratiques qui consacrent à D.ieu le premier produit de toute chose, et ont pour but de développer chez l’homme la générosité et de diminuer chez lui le désir de nourriture et l’instinct de propriété. La récitation du texte qui accompagne l’offrande contribue, elle aussi, à développer des sentiments d’humilité. Elle fait savoir à l’homme qui proclame, la corbeille sur l’épaule, les bontés de D.ieu, qu’il se trouve a Son service. Elle lui rappelle dans la prospérité, les difficultés et les épreuves qu’il a traversées.

A plusieurs reprises la Torah met l’accent sur ce point : « Tu te souviendras que tu as été esclave en Egypte » par crainte des défauts bien connus qu’engendrent la richesse et la facilité : l’insolence, l’orgueil, l’abandon des bons principes etc.

C’est pour prévenir cela que D.ieu a ordonné que chaque année, ces versets de rappel soient récités devant Lui, lors de l’offrande des prémices.

(Le Guide des Egarés 3, 39)

 L’auteur de Aqédat Yts’hak développe un point de vue analogue.

Reconnaître l’existence de D.ieu, c’est avant tout prendre conscience qu’Il est la source de tout bien et que la force de l’homme et la puissance de son bras ne sont pour rien dans sa réussite bien qu’ils aient été nécessaires. Penser différemment c’est rejeter du même coup le joug et la crainte de D.ieu, et s’exposer aux conséquences de cette attitude.

Le but de ce rite, est d’amener l’homme à maîtriser ses appétits et à le pousser à un sentiment constant de reconnaissance envers D.ieu, pour tous les bienfaits dont Il le comble à chaque instant de la vie.