hafets hayim2

Lachon Hara – Cours 9

 

Chapitre 9 – « Avak Lachon Hara »

  1. Qu’est-ce que le « Avak Lachon Hara» ?

Certaines déclarations ne constituent pas en soi du Lachon Hara puisqu’elles ne spécifient aucun méfait mais le laissent sous-entendre. Dans ce cas, on parle de de « Avak Lachon Hara », ce qui est également interdit.

Par exemple, dire : « Qui aurait pu imaginer qu’il arriverait aussi loin ? » est défendu puisqu’on insinue clairement qu’une telle personne en est bien incapable…

Faire l’éloge d’une personne devant ses ennemis constitue également du « Avak Lachon Hara ».

De même, il est interdit de louer un individu à l’excès, même devant des personnes qui n’éprouvent aucune animosité à son égard, puisqu’on craint que le locuteur ou les auditeurs finissent par y apporter un bémol en faisant état de ses défauts.

  1. Faire l’éloge d’une personne en présence d’un groupe

Il est interdit de faire l’éloge d’une personne en présence d’un groupe étant entendu qu’il risque toujours de se trouver quelqu’un – parmi les auditeurs – qui ne partage pas l’estime qu’on lui porte et qui s’empresse d’ajouter quelques commentaires. A nouveau, il est question de « Avak Lachon Hara ».

  1. Eloge nuisible

Il est interdit de vanter l’hospitalité ou la générosité d’une personne puisque des individus peu scrupuleux peuvent abuser de sa gentillesse et lui porter préjudice. Cet interdit concerne tout éloge qui risque de causer du tort à la personne qui est mise en valeur.

  1. Eviter les « Baalé Lachon Hara»

Il est interdit d’habiter dans le voisinage de « Baalé Lachon Hara ». Cette précaution s’impose également aux lieux de prière ou d’étude : il faudra éviter de s’asseoir ou d’étudier avec des personnes qui délient facilement leur langue. Même si l’on a fermement l’intention de ne pas prêter foi à leurs paroles médisantes, le simple fait de les écouter est défendu.

Si l’on se retrouve malgré soi en compagnie de ce genre d’individus et qu’ils se mettent à déblatérer, il est de notre devoir de leur en faire la remarque et de leur rappeler l’extrême gravité de cet interdit, même si l’on sait que l’on ne sera pas entendu, afin de ne pas être perçu par eux comme un des leurs.

  1. Sensibiliser les enfants à cet interdit

Il est fondamental d’habituer les enfants, dès le plus jeune âge, à éviter les sujets interdits dans leurs conversations puisque l’accoutumance est une des raisons principales de la négligence dans ce domaine. Ce n’est qu’en leur apprenant le plus tôt possible à surveiller leur langue qu’ils parviendront à l’âge adulte à se garder de la médisance.

  1. Ebruiter un secret

Il est interdit de divulguer des informations qu’une personne nous a confiées sans avoir reçu son autorisation préalable et explicite. Evidemment, si ses propos sont répréhensibles, les rapporter est absolument défendu.

 

hafets hayim2

Lachon Hara – Cours 8

 

Chapitre 8 – Emettre des propos médisants : cas de figure

  1. Lachon Hara sur un proche parent

L’interdiction d’émettre des propos médisants concerne aussi bien les hommes que les femmes, les proches parents de la personne mise en cause et les moins proches.

  1. Sur le conjoint

Il est interdit de médire de son conjoint ou de sa belle-famille auprès de ses proches, par exemple. Hélas, cette mauvaise habitude est répandue. Cependant, si les intentions sont bonnes et le but recherché constructif, il est permis d’émettre des propos médisants à ce sujet.

  1. Médire d’un enfant

Il est interdit de médire d’un enfant, même s’il n’a pas encore atteint la maturité religieuse si cela risque de lui porter préjudice (moral ou physique).

Cependant, si l’on est convaincu de la nécessité de la chose – si l’on souhaite le corriger, par exemple – on pourra rapporter les faits qui l’incriminent à condition qu’ils soient véridiques et que ceci ne le pousse pas à la rébellion.

  1. Médire d’un ignorant ou d’un érudit

L’interdit de médisance concerne également l’ignorant en Torah, et à plus forte raison l’érudit, ce qui est plus grave encore.

Ne nous laissons pas séduire par les arguments du mauvais penchant selon lesquels les véritables érudits en Torah n’existent plus de nos jours. Bien au contraire, toute personne qui, aujourd’hui, est capable de répondre à une question de halakha (Loi juive) est considérée comme un Talmid ‘Hakham (érudit en Torah) à ce sujet.

  1. Médire d’un hérétique

Il est non seulement permis de médire d’un hérétique – c’est-à-dire d’une personne qui nie la véracité de la Torah, même partiellement – mais également de le ridiculiser et de le haïr, ce qui relève de notre devoir.

  1. Lachon Hara sur un mécréant

S’il le fait est établi et indubitable qu’une personne est mécréante – c’est-à-dire qu’elle transgresse régulièrement les commandements connus de tous – il est permis de la dénigrer, d’entendre et de croire le Lachon Hara qui la concerne.

  1. Médire des fauteurs de querelles

Médire d’un fauteur de querelles est autorisé sous trois conditions :

  1. Si les faits rapportés sont à même de mettre un terme à la dispute.
  2. Il faut tenir de première main que la querelle est injustifiée, ce qui doit être un fait avéré. Si cette information nous parvient indirectement, il nous est interdit de la révéler.
  3. S’il est possible de faire cesser la controverse d’une autre manière, il faudra l’employer en priorité.

Le ‘Hafets ‘Haïm insiste sur la difficulté de juger si nous disposons d’autres moyens ou non pour apaiser une querelle. Il convient, par conséquent, de ne pas s’empresser de recourir à la médisance.

  1. Médire d’une personne défunte

Médire d’une personne décédée est formellement interdit, à plus forte raison si celle-ci était érudite en Torah.

  1. Interdiction de relater du Lachon Hara à des proches parents

Un mari n’a pas le droit de dire du Lachon Hara à sa femme et inversement, ou à tout proche parent.

Cependant, un homme (ou une femme) est autorisé à mettre sa femme en garde de la malhonnêteté d’une personne qui pourrait lui causer un préjudice. S’il ne détient ces informations que de seconde main et que les faits ne sont pas avérés, il devra le spécifier.

Les conjoints devront faire bien attention, lorsqu’ils partagent leurs impressions sur les évènements de la journée, de ne pas révéler les différends qu’ils ont eus avec d’autres personnes afin d’éviter de réveiller les querelles et la haine.

  1. Médire d’un parent de l’auditeur

Il est interdit de médire des proches de l’auditeur, même dans une intention constructive. Par exemple, il est interdit de dénigrer son frère auprès de son père, puisque l’on pourrait obtenir le même résultat d’une autre manière. Il est cependant permis de le faire si l’on ne dispose pas d’autre moyen.

  1. Interdiction de médire d’un juif auprès d’un non-juif

Comme dit, il est interdit de médire d’un juif auprès d’un des nôtres, et cette infraction est d’autant plus grave si on le fait auprès d’un non-juif.

De même, il est strictement défendu de dénoncer un juif auprès d’un non-juif, ce qui est une faute d’une gravité extrême, au même titre que l’hérésie.

  1. En clair

Il est interdit d’entendre ou de prêter foi à des propos médisants portant sur un membre de notre peuple, quel qu’il soit, à l’exception de l’hérétique, du délateur et du pécheur invétéré.

  1. Entendre des propos médisants émis par un proche parent

Il est interdit d’entendre et de prêter foi à des propos diffamatoires émis par ses propres parents ou toute autre personne apparentée.

Si les parents profèrent des paroles médisantes, il est non seulement interdit d’entendre, mais il faudra également leur faire comprendre, avec respect, que ces sujets de conversations sont prohibés.

En vérité, tout chef de famille se doit de servir d’exemple à ce sujet !

 

rome

Paracha Vayichla’h 5775

L’ULTIME EPREUVE

« Essav courut à sa rencontre, l’enlaça, tomba à son cou et l’embrassa »

(Genèse 33, 4)

La vie de Ya’akov pose les jalons de l’histoire d’Israël. Parti en exil, il traversa une série ininterrompue d’épreuves : d’abord l’hostilité de ‘Essav, puis la fourberie de Lavane et maintenant, de nouveau, l’affrontement avec son frère. Jusqu’à présent, Ya’akov séjournait dans un pays étranger, dans un milieu hostile. Il surmonta aussi cette épreuve et resta fidèle à lui-même : «J’ai séjourné chez Lavane» mais j’ai observé les 613 commandements et je n’ai pas appris de ses mauvaises actions (Rachi 32, 5).

A présent, Ya’akov s’attend à une nouvelle offensive de ‘Essav et prend minutieusement toutes ses dispositions : «Il se prépara de trois façons : en envoyant des cadeaux, en priant, et en se préparant au combat » (Rachi 32, 9). Quelle que soient les modalités de cette confrontation, Ya’akov considère ‘Essav comme un adversaire.

Cependant, l’épreuve qu’il affrontera sera plus éprouvante qu’il ne le pensait. Soudain, l’ennemi menaçant qui avançait à la tête d’une troupe armée fait volte-face et le traite en frère : « ‘Essav courut à sa rencontre, l’enlaça, tomba à son cou et l’embrassa ». L’épreuve de la fraternité, bien plus redoutable que les précédentes, suscita la prière que Ya’akov adressa à D.ieu : « Sauve-moi, de grâce, de la main de mon frère, de la main de ‘Essav » (32, 12).

Effectivement, ‘Essav allait suggérer à Ya’akov : « Voyageons et allons, j’irai à ton côté» (Genèse 33, 12). Marchons ensemble, main dans la main. Suivons le même chemin, nos conceptions se rejoignent. Cette attitude-là constitue le plus grand danger que puisse courir Ya’akov. En effet, s’il accepte ce compromis, il cessera d’être Ya’akov, il cessera d’être Israël.

Notre Patriarche est-il assez fort pour résister à cette terrible tentation ? D.ieu, qui n’envoie d’épreuves qu’aux personnes capables de les surmonter, va donc évaluer la résistance de Ya’akov. La lutte avec l’ange a pour but de tester la nature de sa foi. «Saura-t-il garder, envers et contre tous, son identité spirituelle, sa foi totale» ?

L’ange qui attaque Ya’akov est, selon le midrach, le mauvais penchant (yétsér hara). Le yétsér hara aveugle l’homme et l’empêche de voir D.ieu. Dans le même sens, il est dit «Un homme combattit avec lui vayéavèq ich ‘imo» (Genèse 32, 25). Dans le terme vayéavèk, on décèle le mot avak, poussière. Dans leur lutte, dit le midrach, la poussière s’éleva. C’est le combat contre les forces qui veulent dissimuler, obscurcir par la « poussière », par les idéaux terrestres, la gloire divine dans le monde. Mais par la puissance de sa foi, Ya’akov résista et triompha de son adversaire. Alors, le voyant prêt, D.ieu lui fit affronter l’épreuve suivante, la plus difficile : la fraternité de ‘Essav !

Le peuple juif a traversé la période où « ‘Essav avait pris Ya’akov en haine… » et où il disait dans son coeur « … je tuerai Ya’akov, mon frère » (Genèse 27, 41), le temps où Lavane le trompait, abusait de lui et voulait sa perte : «L’Araméen voulait faire disparaître mon père » (Deutéronome 26, 5).

Le peuple d’Israël a subi l’oppression romaine, les persécutions du Moyen Age et nous pouvons dire qu’en général, à l’instar de notre Patriarche : «J’ai observé les six cent treize commandements et je n’ai pas appris de ses mauvaises actions». Cependant, depuis l’ère de l’émancipation, notre peuple affronte l’épreuve la plus dangereuse : celle de la liberté et de la fraternité avec les nations qui veulent le détacher de son D.ieu. Les portes des ghettos et des mellahs se sont ouvertes et les pertes ont été effroyables. L’identité de notre peuple qui témoigne de l’existence de D.ieu sur terre et de la véracité de Sa loi est en jeu ! Bien qu’au bout du compte, « ton nom sera Israël » et que le Tout-Puissant nous aidera à triompher, notre rôle à nous est de lutter, d’être les artisans de cette victoire.

Aux descendants de ‘Essav qui cherchent à nous attirer à eux en nous suggérant :

«Voyageons et allons côte à côte, unissons nos idéaux, tâchons de nous ressembler, vivons en frères », nous répondons comme Ya’akov : «Les enfants sont délicats… moi, je voyagerai lentement, à mon allure» (Genèse 33, 12-14). Si les parents ont su préserver leur identité juive, les enfants sont les plus menacés par la proposition de ‘Essav ils sont « délicats », vulnérables.

Veillons à leur inculquer les valeurs qui nous différencient des autres peuples et à les armer contre l’assimilation et la fusion avec le milieu ambiant. C’est ainsi que nous triompherons de cette terrible épreuve pour arriver, sains et saufs, au but final, « au lever de l’aube», à l’époque messianique : «jusqu’à ce que j’arrive chez mon maître, à Séïr» répondit Ya’akov à la proposition de ‘Essav. C’est seulement à ce moment, explique Rachi, que nous rejoindrons ‘Essav, comme le dit le prophète: « Et les sauveurs monteront sur la montagne de Sion pour juger la montagne de ‘Essav, et la royauté appartiendra à D.ieu ! (Ovadia 1, 21)

(adapté à partir de Imré Cohen)

hafets hayim2

Lachon Hara – Cours 7

Le livre de la vie

Partie I – Les lois de la médisance

Chapitre 7 – L’interdit de croire le Lachon Hara : cas de figure

  1. Interdiction de croire du Lachon Hara émis en présence de nombreuses personnes

Il est interdit de prêter foi à des propos médisants quel que soit le nombre d’auditeurs présents. Que le Lachon Hara soit proféré devant une ou plusieurs personnes, il est interdit de le tenir pour vrai et d’agir en conséquence de cause. Comme dit, il nous est seulement permis de nous mettre sur nos gardes au cas où il y a lieu de craindre qu’un dommage puisse être causé.

  1. Lachon Hara émis en présence de la victime

Croire à des paroles dénigrantes est interdit même si celles-ci ont été émises en présence de la victime. Il en est de même lorsque la personne incriminée se tait et ne nie pas les faits qui lui sont reprochés bien qu’en général, elle s’empresse de protester pour défendre sa réputation.

  1. Lachon Hara émis par deux personnes ou plus

Même si les faits sont rapportés par deux personnes ou plus, il est interdit d’y prêter foi et de les tenir pour vrais. Il est seulement permis d’adopter une certaine méfiance à l’égard de la personne visée, comme c’est le cas avec du Lachon Hara émis par une seule personne.

  1. Bruits et rumeurs

De même, il est interdit de croire à ce que les rumeurs colportent, quelle que soit la nature du méfait prétendument commis.

Il est interdit de propager ces bruits, à plus forte raison lorsque les dommages causés risquent d’être accrus, comme dit au chapitre 2.

  1. Médire d’un mécréant

Il est interdit de croire à la rumeur qui accuse un juif qui n’est pas connu pour transgresser régulièrement les commandements de la Torah. Mais si ces bruits incriminent un mécréant [Racha], en l’occurrence une personne qui enfreint régulièrement et sciemment les commandements dont la gravité est connue de tous, il est permis d’y prêter foi.

  1. Lorsque l’auteur s’inclut dans ses propos médisants

Lorsque le locuteur livre une information médisante le concernant ainsi qu’une autre personne, il sera permis de croire uniquement les faits qui le touchent.

  1. Lachon Hara émis par une personne digne de confiance

L’interdiction de tenir des propos diffamatoires pour vrais s’applique également dans le cas où le locuteur jouit de notre confiance ou est réputé comme une personne digne de foi. Plus encore, il est interdit de le rapporter plus loin s’il y a lieu de juger favorablement la victime de la médisance.

Notons que de nos jours, une telle personne, dont le témoignage équivaut à celui de deux témoins et à qui l’on peut prêter foi n’existe pas. (Béer Mayim ‘Haïm)

  1. Lachon Hara émis sur une personne qui enfreint un interdit connu de tous

Si la victime est accusée d’avoir enfreint un interdit de la Torah connu de tous et qu’on ne peut lui accorder le bénéfice du doute, il est permis de tenir le témoignage d’une personne digne de confiance pour vrai, à condition de respecter ces deux impératifs :

  1. Que le rapporteur ait été un témoin direct de la transgression, fût-il une personne digne de confiance ou non.
  2. Si le rapporteur a lui-même assisté aux faits incriminés, on peut y croire tant que la personne dénigrée ne s’est pas repentie. Cependant, il est absolument défendu de les répéter plus loin et encore moins de lui porter préjudice.

 

  1. Lachon Hara émis sans intention de nuire

Si le témoin direct d’une transgression le rapporte sans mauvaise intention et qu’il n’y a pas lieu d’accorder le bénéfice du doute au fauteur, on pourra prêter foi à ces propos tant que la personne incriminée ne s’est pas repentie. Cependant, cette indulgence est difficilement applicable puisque toutes ces conditions sont rarement réunies, ce qui explique pourquoi le ‘Hafets ‘Haïm lui-même nous recommande de ne pas en tenir compte. (Béer Mayim ‘Haïm)

  1. Lorsqu’il y a lieu de croire que les faits incriminés sont véridiques

Il est interdit d’attacher foi à un récit diffamatoire, même si les faits incriminés semblent avérés et correspondent au caractère de la personne mise en cause aussi longtemps que l’information n’a pas été absolument prouvée et que la Torah nous interdit de tenir ces informations pour vraies.

  1. Elucider la question

Dans ce cas, il est indispensable de vérifier que la victime de la médisance est réellement concernée par les faits qui lui sont reprochés et qu’il n’y a pas méprise. L’auditeur pourra se fier aux informations véhiculées si, connaissant la personne mise en cause, il reconnaît lui-même que les faits incriminés sont avérés.

  1. Limites

Cette autorisation ne concerne que le fait de prêter foi à la médisance, mais en aucun cas de la répéter plus loin ou de porter atteinte à la personne visée.

  1. Prérogatives du Beth Din

Le Beth Din est autorisé, dans certains cas, à se fonder sur des faits qui prouvent l’implication du sujet et la véracité de l’accusation qui lui est portée, à condition que ces informations aient été déposées par des témoins. Mais si celles-ci ont été livrées par la partie adverse, il est interdit aux juges de s’y fier. En outre, ils ne pourront y prêter foi que pour pousser le suspect à reconnaître ses torts.

  1. Se fier aux déclarations du plaignant

Il est strictement interdit au Beth Din ou à toute autre instance de se baser sur les déclarations du plaignant pour menacer ou punir la personne qu’il accuse. Hélas, cette interdiction est souvent enfreinte faute de connaissances étendues en la matière.

 

echelle

PARACHAT VAYETSE 5775

L’échelle de la vie

Il (Yaakov) eut un rêve que voici : Une échelle était dressée sur la terre, son sommet atteignait le ciel, et des anges divins montaient et descendaient le long de cette échelle.

(Genèse 18, 12)

Yaakov part pour ‘Haran, sur l’ordre de ses parents pour prendre une épouse parmi les filles de son oncle Lavane. Ayant fait halte en chemin, il s’endort et fait un rêve lourd de sens : Il y voit une échelle, dont le sommet atteint le ciel et sur laquelle montent et descendent des Anges célestes.

Quelle est la signification d’un tel rêve à un moment où Yaakov se trouve à la croisée des chemins ? Yaakov quitte le pays de Canaan, sa famille, son milieu et ses habitudes pour s’engager dans une voie nouvelle, tout à fait différente de celle qu’il a connue jusqu’à présent. Il va fonder un foyer, élever des enfants, travailler et vivre auprès de son beau-père, rencontrer Êssav son frère, autant d’épreuves qui exigent une force de caractère peu commune. La vie se présente à Yaakov comme une échelle, qu’il peut gravir ou descendre, à sa guise, et selon ses forces. S’il est en mesure de surmonter les difficultés et les tentations avec la force morale requise, il connaîtra l’ascension spirituelle mais si, au contraire, il se montre trop faible, il risque la déchéance.

C’est ainsi que doit être envisagée toute épreuve morale, toute expérience humaine, toute vie : dans le sens d’une descente ou d’une montée. Dans le premier cas, c’est la chute morale, la perte des valeurs. Dans le second cas, c’est l’élévation spirituelle, la progression dans les valeurs morales de sainteté, de pureté et d’attachement à D.ieu. L’homme, quel qu’il soit, risque, à tout moment au cours de son ascension, de trébucher et de tomber, et cela même s’il est parvenu à la perfection spirituelle du Juste.

Dans notre texte, Yaakov nous est présenté comme un juste, un fait qui est confirmé à deux reprises par le commentaire de nos Sages : Tout d’abord au verset 10, à propos de son départ de Béer Chéva, Rachi rapporte : Dans quel but nous parler de son départ ? C’est pour nous dire que le départ d’un tsadik, d’un Juste, fait impression dans la ville. Tant que le Juste est dans la ville, c’est lui qui est sa beauté, c’est lui qui est son éclat, c’est lui qui est sa majesté…. Au verset 17 : Le Saint béni soit Son Nom a dit : « Ce tsadik ce Juste viendrait dans Ma demeure et s’en irait sans y passer la nuit ! » C’est D.ieu Lui-même qui confère à Yaakov le titre de tsadik. Mais l’homme, lui, n’aura jamais, à aucun moment de sa vie, la certitude de sa perfection morale, de son «succès» spirituel : Dieu seul peut juger et trancher.

Yaakov a compris le sens du message qui lui est adressé dans le songe de l’échelle. Il sait qu’il va devoir affronter maintes difficultés et surtout se mesurer à un ordre de choses tout à fait nouveau. Aussi, avant d’arriver à ‘Haran, il fait un détour par la Yéchiva de ‘Ever : il y passe quatorze années entières à étudier la Torah et y puise les forces spirituelles nécessaires pour affronter Lavane, puis, plus tard, son frère Êssav. Les richesses spirituelles qu’il a acquises durant ces intenses années d’étude lui seront également essentielles pour établir son foyer et élever ses nombreux enfants dans ce milieu hostile qu’est la maison de Lavane.

Yaakov s’est fixé encore un signe, un point de repère pour ne jamais trébucher sur cette voie semée d’embûches : Il se promet de ne jamais oublier le sens véritable des événements et de toujours voir en toutes choses la marque de la Providence Divine. Yaakov prononça un voeu en ces termes : si D.ieu est avec moi, et qu’il me protège dans la voie où je marche, s’il me donne du pain à manger et des vêtements pour me couvrir, si je retourne en paix à la maison de mon père, et que l’Eternel soit pour moi D.ieu, alors, cette pierre que je viens d’ériger en monument deviendra la maison de D.ieu et, tous les biens que Tu m’accorderas, je veux T’en offrir la dîme. (ibid. 20)

Est-ce là, tout le sacrifice que Yaakov est prêt à faire ? Est-ce tout, ce qu’il est prêt à payer en retour de tous les bienfaits, qu’il souhaite recevoir de D.ieu ? Cela s’appelle-t-il de la générosité ? Alors qu’il est en proie au dénuement le plus total, au plus profond de la détresse, il se tourne vers D.ieu pour Lui demander de l’aider. Et que Lui promet-il en retour ? La dîme ! Un dixième de ce qu’il recevra ! Imaginerions-nous une personne, démunie de tout, qui solliciterait l’aumône, et exprimerait sa grandeur d’âme en suppliant son bienfaiteur : «Accorde-moi un million d’euros ! En reconnaissance, je te donnerai cent mille !»

Très souvent, les hommes sont tellement convaincus que tous leurs biens, leurs acquisitions et leurs réussites matérielles sont le fruit de leurs efforts personnels, de leur intelligence supérieure, de leur zèle et de leur sens inné des affaires qu’ils finissent par avoir le sentiment inébranlable de leur maîtrise et de leur supériorité… au point d’oublier le principal instigateur de toutes choses, le Maître du monde. Ils sont sûrs en leur for intérieur que : C’est ma propre force, c’est le pouvoir de mon bras qui m’a valu cette richesse (Deutéronome 8, 17). Mais la Torah met en garde énergiquement contre une telle attitude : Garde-toi d’oublier l’Eternel, ton D.ieu, de négliger Ses préceptes, Ses institutions et Ses lois… (ibid. 8, 11).

Aux yeux de Yaakov, telle ou telle somme d’argent n’a pas d’intérêt. Sa pensée est beaucoup plus profonde et se situe à un autre niveau : donner la dîme n’est ni une expression de générosité, ni de reconnaissance. La somme n’a ici aucune importance. Ce qu’il veut affirmer, c’est l’idée de la suprématie divine sur toute chose, sur tout bien, sur tout événement : je suis conscient que Tu es Celui qui donnes ; tout ce que j’ai, me vient de Toi seul ; rien n’est dû à mon pouvoir ou à mes capacités personnelles. Ce sont là les pensées de Yaakov en ce moment de profonde détresse. A cet instant même il prend la ferme décision de demeurer en communion avec D.ieu, malgré tout, et de donner la dîme de tout ce qu’il gagnera. Yaakov exprime ainsi sa foi inébranlable envers D.ieu.

Cela nous conduit à la conclusion que J’homme doit à tout moment s’en remettre totalement à D.ieu. De ce fait, tous les soucis quotidiens s’effacent, et les angoisses s’envolent. Un petit morceau de pain trouvé au bon moment, un vêtement cousu à point nommé sont autant de signes de la Providence Divine. Mal interprétés, ils peuvent conduire, qu’à D.ieu ne plaise, à l’hérésie.

Mais, s’ils sont lus correctement, ils révéleront la présence du divin dans le quotidien le plus banal.

Fidèle à cette voie, Yaakov a réussi à insuffler sa foi sans faille, à ses épouses. Celles-ci ont su donner à leurs enfants des noms qui rappelaient la manifestation de la Main Divine au cours de leurs expériences douloureuses. La signification littérale de chaque nom correspond à l’événement vécu. Réouven : D.ieu a vu mon humiliation ; Chim’one : D.ieu a entendu que fêtais dédaignée. Lévi : Désormais mon époux me sera attaché. Quelle est la femme qui accepterait de perpétuer son humiliation à travers le nom de son fils ? Léa nous en a donné la leçon. Ra’hel a, elle aussi, donné des noms chargés de signification Yossef : D.ieu a effacé ma honte. D.ieu est perçu à chacune de leurs pensées. La naissance d’un enfant devient l’occasion d’y voir un don de l’Eternel, de s’en réjouir et d’en remercier le Créateur. Or, cela aurait pu être l’occasion de descendre les échelons de l’échelle si on ne percevait dans cet événement qu’un simple phénomène naturel permettant de perpétuer l’espèce ou d’assurer la continuité de l’affaire familiale.

Un autre épisode magnifique se trouve à la fin de notre section. Lavane s’est lancé à la poursuite de Yaakov. Il fouille dans tous ses effets pour trouver les objets dérobés. Quelle humiliation ! Il ne trouve rien. Yaakov devrait saisir l’occasion de se mettre en colère et de reprocher vivement à Lavane sa conduite ridicule ! Or, que nous révèlent nos Sages ? La colère des ancêtres a plus de valeur que la modestie des enfants. Où voyons-nous la colère des ancêtres ? Yaakov s’emporta et se plaignit à Lavane (Genèse, 35) : Croyez-vous qu’il y ait eu là des échanges de coups et de blessures ? Au contraire, Yaakov apaise la colère de Lavane : «Quel est mon crime, quelle est ma faute pour que tu t’acharnes contre moi ? Après avoir fouillé dans toutes mes affaires, qu’as-tu découvert qui appartienne à ta maison ?

Yaakov, dont la colère est justifiée, s’excuse auprès de Lavane et cherche à gagner son coeur. Nos Sages ont exalté la colère de Yaakov. Ils ont approuvé l’ancêtre Yaakov qui est fidèle à l’enseignement reçu au cours du «songe de l’échelle».

Yaakov a appris à dominer ses sens ; il en est le maître. Il voit dans chaque événement la main de D.ieu. Il s’élève de degré en degré, dans la foi en D.ieu, jusqu’à la communion parfaite. Dans l’échelle de la vie, il a choisi un seul sens : Celui de l’ascension. C’est la fonction que remplit l’échelle dans son songe. Il nous a enseigné comment emprunter l’échelle de la vie.

 

(adapté à partir des Lectures Chabbatiques)

jumeaux

Paracha Toldot 5775

Surmonter les épreuves

Esau prit Jacob en haine, à cause de la bénédiction dont son père l’avait béni. Et Esau se dit en lui-même : « Le temps du deuil de mon père approche. Je tuerai Jacob mon frère».

Le Midrach rapporte : les méchants sont tributaires de leur coeur, tel qu’il est dit : Esau se dit en son cœur (ici), Bilaam se dit en son coeur (Nombres), l’insensé se dit en son coeur (Psaume 14). Par contre, les sages sont maîtres de leur coeur, tel qu’il est dit : David dit à son cœur, ‘Hanna parlait à son coeur, et cela à l’exemple du Créateur. Et D.ieu dit à Son coeur.

Dans ce texte, l’expression hébraïque pour désigner la pensée intérieure est comprise par nos Sages comme une expression de l’identité de la personne qui pense. « Se dire en son coeur » signifie – écouter son coeur, se soumettre aux désirs de son coeur, de ses sentiments. Cela désigne le mode de pensée des mécréants. Par contre, « dire à son coeur », c’est maîtriser ses sentiments, faire triompher la raison sur le cœur : cela caractérise les sages. D’autant plus que la même expression est utilisée en parlant du Créateur.

Esau est classé ici dans la catégorie de ceux qui se laissent gouverner par leur coeur : ce son les impies. Pourquoi? Quels signes de méchanceté apparaissent-ils dans sa conduite? Esau ne mérite-t-il pas plutôt toute notre indulgence? C’est un homme qui a tout perdu dans la vie, brusquement et contre toute raison apparemment valable. A ses yeux, son frère Yaakov a usurpé le droit d’aînesse, et par conséquent, la bénédiction paternelle. Qu’aurions-nous fait à sa place ? Il fait preuve d’un grand courage et maîtrise son désir de vengeance jusqu’au deuil de son père. Qui est capable d’une telle maîtrise de soi? Est-il facile de se contenir de la sorte, si importante que soit la mitsva du respect des parents? Esau écoute la voix de son coeur et calme sa haine pour ne pas peiner son père. Est-ce là de la méchanceté? Est-ce là une raison pour le condamner à figurer parmi les impies?

Nos Sages ont une conception du comportement humain bien différente de la nôtre. Pour nous, un homme qui lutte et arrive à maîtriser ses mauvais penchants, à dominer ses tendances à la jalousie, à la haine, à la vengeance, est un homme qui sort de l’ordinaire, différent du commun des mortels. Nous dirons qu’il est un saint, qu’il fait plus que son devoir. Pourquoi pensons-nous ainsi? C’est parce que nous évoluons dans une société où les critères de conduite « normale » sont ceux qui sont dictés par le sentiment et non par la raison. La jalousie, l’instinct corporel et la course aux honneurs sont les bases de la réalité sociale. Toute conduite opposée à cette ligne est jugée comme une conduite de sainteté qui ne relève pas de la réalité de notre époque ni de notre société. Notre société est fondée sur la poursuite de biens matériels, animée de luttes sanglantes pour obtenir tout ce que le corps désire au détriment des principes de raison et de morale qui apparaissent certainement au cours de discours, et aux dissertations morales, sans jamais se traduire dans les faits. Tout comportement conforme aux principes moraux est l’apanage de personnes sages, illustres et rares.

C’est là que réside notre erreur. La Torah nous enseigne qu’il n’y a pas de vie possible si l’homme au moment de l’épreuve, ne manifeste pas ce qui le différencie de l’animal, s’il ne justifie pas le but de sa création, de sa venue au monde. L’homme peut disserter longuement sur le caractère nuisible de la colère mais s’il ne se maîtrise pas au moment où il a une raison quelconque de se mettre en colère, quel intérêt présente sa dissertation? De même, l’homme apparaît dans conduite quotidienne sous des dehors polis, voire nobles, mais quand il est aux prises avec la haine, le désir vengeance, il se laisse emporter par les penchants de cœur et devient méconnaissable. Ce n’est plus l’homme que tous connaissent, que tous honorent et respectent perd brusquement l’image de D.ieu, et ses réactions sont semblables à celles des animaux. Dominer ses mauvais penchants n’est pas l’apanage des justes, des saints : C’est le devoir impératif de tout être humain, du commun des mortels.

Il y a balance et balance. La balance qui pèse les actes de l’homme doit être plus exacte et plus délicate que celle du pharmacien. Une erreur infime peut exprimer des écarts inquiétants. Un homme pourrait croire qu’il est droit, intègre, sans reproches. Cette balance pourrait lui prouver qu’il est un criminel. Ainsi en est-il d’Esau. En apparence, il fait preuve de grandeur : il se retient de tuer son frère Yaakov sur le champ.

En réalité, son comportement n’a pas pour origine une motivation innocente pour diverses raisons : tout d’abord, Yaakov s’est sauvé. De plus, Esau a envoyé à ses trousses son fils Elifaz avec pour mission de supprimer l’oncle Yaakov.

Rivka a bien spécifié à Yaakov en lui recommandant de fuir le toit familial : Jusqu’à ce que ta colère de ton frère soit calmée. Il y a donc colère. Esau n’a donc pas maîtrisé sa colère, il est tributaire de ses penchants. Il attend le moment propice pour mettre ses desseins à exécution. L’apparence de maîtrise de sa colère n’est qu’une sombre machination. Il a peur d’éveiller la colère de son père, car il mesure la gravité de ses conséquences éventuelles. Après une analyse profonde, il s’avère donc que ce que nous avions cru être la grandeur d’ Esau, n’est que l’expression d’une nature corrompue à sa base. Notre aïeule Rivka l’a bien compris; et elle n’a pas trouvé d’autre solution que de conseiller à son fils Yaakov de fuir; pour échapper à un meurtre certain dont l’auteur ne serait l’auteur que Esau.

Le caractère d’ Esau a été ainsi défini par le prophète Amos : Parce qu’il a poursuivi son frère avec t’épée, étouffant toute pitié, parce que sa colère ne cesse de faire des victimes, et qu’il se complait dans une haine sans fin (Amos 1,11).

L’homme a le devoir de procéder à une introspection sévère afin d’être conscient de l’existence de ses penchants et du danger qu’ils recèlent, même s’il n’est pas en mesure de les maîtriser. Cela lui permettra d’être capable d’éviter l’embûche sur laquelle il avait trébuché. C’est en tirant la leçon des échecs du présent, qu’il s’acheminera vers la perfection humaine, qui ne s’acquiert qu’en surmontant toute épreuve. Il faut réussir à affirmer sa maîtrise sur son coeur, à faire triompher la raison sur le sentiment.

(adapté à partir de Ethique et Pratique dans le Pentateuque)

hafets hayim2

Lachon Ara – Cours 6

 Le livre de la vie

Partie I – Les lois de la médisance

Chapitre 6 : Entendre et prêter foi à des propos médisants

  1. Interdiction d’y croire

Croire des propos médisants proférés sur son prochain est un interdit de la Torah. Par conséquent, il est défendu de tenir du Lachon Hara pour vrai. Nos Sages ont particulièrement insisté sur cet interdit au point de déclarer qu’une personne qui prête foi à des mauvaises paroles mérite d’être jetée aux chiens.

  1. Interdiction d’entendre des propos médisants

La Torah interdit également l’audition du Lachon Hara, même à celui qui n’a pas l’intention d’y croire.

Cependant, si les faits rapportés n’ont aucune incidence sur l’avenir, ou si les propos diffamatoires présentent quelque utilité pour l’auditeur (s’il souhaite par exemple se prémunir contre un préjudice dans l’optique d’une association commerciale ou d’un mariage etc.), il est permis d’écouter.

Attention, même dans ce cas, il est absolument interdit de tenir ces informations dénigrantes pour vraies !

  1. Comment éviter d’entendre du Lachon Hara?

Si notre interlocuteur s’apprête à médire d’une certaine personne, il faudra s’empresser de lui demander si le sujet de la conversation nous concerne réellement, ou si nous pouvons avoir quelque influence sur la personne visée.

Encore une fois, il est interdit de croire les propos médisants de manière absolue, mais on pourra seulement prendre ses dispositions pour éviter quelque préjudice.

  1. Cas particulier

Dans certains cas, il est même recommandé d’écouter le Lachon Hara afin de disculper la victime auprès de celui qui la dénigre et interpréter les propos diffamatoires qu’il profère à son mérite. Par exemple, si l’on souhaite apaiser notre interlocuteur et l’empêcher de propager sa médisance plus loin.

  1. Entendre du Lachon Hara lors d’une réunion

Si l’on participe à une réunion au cours de laquelle des propos médisants sont émis (ce qui ne pouvait pas être prémédité) et qu’il nous semble vain de réprimander les personnes présentes à ce sujet, il faudra, si possible, quitter les lieux ou, à tout le moins, boucher ses oreilles pour ne pas entendre.

Néanmoins, si ces deux options sont irréalisables (par exemple, si l’on risque de se faire vertement tancé), alors il faudra respecter ces trois conditions :

  1. Décider fermement de ne pas croire les propos diffamatoires.
  2. S’efforcer de ressentir une gêne par rapport à ce qui se dit, et en aucun cas en retirer du plaisir ou quelque profit.
  3. Rester impassible et ne manifester aucun signe d’acquiescement. Au contraire, il convient plutôt d’exprimer son désaccord de quelque manière que ce soit.

 

  1. Réunion peu fréquentable

Ce que nous venons d’expliquer ne s’applique que dans les cas où l’on ne peut éviter ce genre de situations. Mais si la conversation à peine entamée glisse vers des sujets interdits et qu’il est possible de quitter les lieux, il ne faudra pas rester un instant de plus auprès de ces gens. Aussi, si ces personnes sont connues pour tenir des propos médisants et qu’on se joint malgré tout à ce groupe, on transgresse l’interdit d’entendre du Lachon Hara, même si les trois conditions citées au paragraphe précédent sont réunies.

Pire encore, quiconque retrouve ces « Baalé Lachon Hara » pour écouter ce qui se dit est considéré par le Ciel comme un mécréant et un homme de la même espèce, dont la faute est immense.

  1. Tenir les propos médisants pour vrais

Celui qui accepte l’interprétation défavorable du médisant sur certains faits qu’il sait véridiques mais qui peuvent être jugés positivement, enfreint le commandement de « Tu jugeras ton prochain avec équité » et se rend coupable de prêter foi à du Lachon Hara.

  1. Accepter du Lachon Hara sur une personne craignant D.ieu

Si la victime du Lachon Hara est un homme craignant D.ieu et qu’en écoutant les propos médisants à son sujet, on lui refuse le bénéfice du doute, la faute est plus grave encore, puisque la Torah nous demande explicitement de juger favorablement les personnes pratiquantes.

Ce principe s’applique également à toute critique qui dénoncerait les décisions d’un Beth Din ou d’un maître de la Torah. Il est absolument interdit d’y prêter foi et il faudra tâcher d’expliquer au médisant le bienfondé du jugement tranché par le tribunal rabbinique ou l’autorité religieuse incriminée.

  1. Principe général

Tout propos qu’il est interdit d’émettre, on ne pourra l’écouter ni y prêter foi. Le mode de transmission (oral, écrit, par allusion) ne retire rien de la gravité du Lachon Hara.

  1. Prendre ses précautions

Bien qu’il soit interdit de tenir des propos médisants pour vrais, nos Sages nous ont néanmoins autorisés à prendre nos précautions et à adopter une certaine méfiance vis-à-vis de la personne dénigrée afin d’éviter une perte ou tout préjudice.

Cependant, aussi longtemps que la culpabilité du prochain n’a pas été dûment prouvée, nous sommes tenus de lui rendre tous les bienfaits que nous devons à nos semblables. Par conséquent, même dans le cas où on nous révèle qu’une personne est mécréante [racha], nous y sommes tenus.

  1. Prendre ses précautions, un point c’est tout !

Prendre ses précautions, cela ne veut absolument pas dire que l’estime que l’on porte à la victime de la médisance puisse être atteinte ; à plus forte raison nous est-il interdit de l’embarrasser ou de lui porter préjudice. Plus encore, il est absolument défendu de refuser de payer les dettes que l’on aurait envers cette personne, en tirant prétexte des propos diffamatoires qui l’accusent.

En conclusion :

Il est permis de prendre ses dispositions au cas où la personne visée risque de nous causer quelque dommage, cependant, cela ne nous dispense en rien des obligations que l’on a envers elle, comme envers tout autre juif, tant que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas absolument avérés.

  1. Comment se repentir d’avoir accepté du Lachon Hara?

Aussi longtemps que les propos médisants entendus n’ont pas été répétés plus loin, il faudra :

  1. Etre résolu de ne pas croire ce que l’on a entendu.
  2. Prendre sur soi de ne plus jamais écouter ni accepter de Lachon Hara.
  3. Demander à D.ieu de nous pardonner.

Cependant, si l’on a répété le Lachon Hara, on devra s’efforcer de convaincre tous nos auditeurs de l’inanité de l’information qu’on leur a révélée et obtenir le pardon de la victime, avant d’entamer les trois étapes citées plus haut.

 

hafets hayim2

Lachon Ara – Cours 5

Le livre de la vie

Partie I – Les lois de la médisance

Chapitre 5 – Médire d’un homme qui a péché envers son prochain

  1. Faire part d’une infraction dans les devoirs de l’homme envers son prochain

Il est interdit de mentionner une faute commise par un homme envers son prochain, quand bien même les faits sont avérés être véridiques (comme par exemple dans le cas où on l’a vu refuser un service à autrui etc.). Le rapporter serait enfreindre l’interdit de médisance.

Ceci, même si nous sommes nous-mêmes victimes d’une telle négligence : il nous est interdit de le divulguer et encore moins de le faire par esprit de vengeance.

  1. Les défauts

Il est interdit de médire des défauts du prochain et de dire par exemple qu’il manque d’intelligence. En outre, si, à ces propos diffamatoire, se mêlent quelque déclaration mensongère, la faute est plus sérieuse encore et correspond à du « Motsi Chem Ra » [calomnie].

Qualifier quelqu’un de peu intelligent est autrement plus grave, puisque cela risque de lui porter préjudice allant même jusqu’à la perte de son emploi ou de sa respectabilité.

  1. La gravité de ce genre de déclarations

Qualifier quelqu’un de sot est fréquent dans les conversations, ce qui est bien regrettable. En effet, les gens pensent à tort qu’une telle déclaration ne relève pas de l’interdit de médisance. En vérité, une telle remarque est gravissime puisqu’elle révèle les intentions malveillantes de son auteur.

Cependant, il est permis – voire même recommandé – d’invoquer le manque d’intelligence afin d’apaiser les esprits en cas de discorde ou de désaccord. En effet, la paix peut être retrouvée si l’on explique à l’une des parties que l’autre lui a causé du tort parce qu’elle manque de finesse ou qu’elle n’est pas capable de comprendre l’ampleur des dommages qu’elle a engendrés.

  1. Dénigrer un maître de la Torah

Il va sans dire qu’il est absolument interdit de rabaisser un maître de la Torah ou une personne connue pour son érudition en déclarant que son intelligence ou son niveau de connaissances ne justifient pas sa renommée.

  1. Faire part de la faiblesse physique ou de la pauvreté de son prochain

Révéler la faiblesse physique de son prochain au risque de lui causer du tort constitue bien du Lachon Hara.

De même, dire d’une personne qu’elle est pauvre ou qu’elle n’est pas aussi aisée qu’on le prétend est également interdit.

  1. Selon le contexte

Une même phrase peut constituer du Lachon Hara au sujet d’une personne et son contraire pour une autre. Par exemple, dire d’un individu qu’il s’adonne à l’étude de la Torah trois ou quatre heures par jour : s’il s’agit d’une personne qui travaille, cette déclaration est élogieuse. Mais s’il est question d’un homme qui consacre ses journées à l’étude, ce n’est guère valorisant.

Remarque importante :

Comment savoir si une déclaration est médisante ou non ? Il convient de se demander si elle risque de porter préjudice à la personne visée (financier, moral, socio-économique etc.).

  1. Dénigrer les biens du prochain

Il est interdit de dire du mal des biens du prochain, puisque cela peut lui causer du tort, comme dans le cas – fréquent, hélas – des commerçants, au sujet de leur marchandise.

  1. Lachon Hara formulé par deux personnes ou plus

Lorsque le Lachon Hara est formulé par deux personnes ou plus, la faute est plus grave encore, étant donné qu’une information rapportée par plusieurs individus semble plus véridique.

 

colombe

Paracha Hayé Sarah 5775

Il fit s’agenouiller les chameaux hors de la ville près de la fontaine.

(Genèse 24, 11)

 La Bible nous trace, à plusieurs reprises, le tableau poétique des mariages conclus « au bord d’un puits ». Nous connaissons, en dehors de l’exemple de Isaac et Rébecca, celui de Jacob et Rachel et celui de Moïse et Tsippora.

La Torah veut, ce faisant, nous représenter l’eau de la terre comme le symbole de la pureté et le signe de la fécondité. « Et le souffle de Dieu planait sur la face des eaux» (Genèse 1, 2). La femme juive se sent attirée vers l’eau naturelle qui constitue la source de pureté dans sa vie conjugale, et, réciproquement, les eaux pures qui jaillissent du sol, montent à la rencontre de la femme qui incarne en elle l’idéal de pureté et de chasteté (Cf. Genèse. Raba c. 60 : les eaux du puits montèrent vers Rébecca).

Les mariages au bord du puits symbolisent ainsi l’idée de pureté qui doit former la base de toute la vie conjugale.

 

Isaac conduisit Rebecca vers la tente de Sarah sa mère. Il prit Rebecca pour femme et il l’aima.

(Genèse 24, 11)

 Voici encore un trait fondamental, qui n’a point disparu chez les descendants d’Abraham. Plus longtemps elle fut son épouse, plus il l’aima. Tout comme ce mariage du premier fils du peuple juif, la plupart des mariages juifs se concluent sur la base de la raison et non sur celle de la passion momentanée. Les parents et les membres de la parenté se consultent pour savoir si les jeunes gens sont bien assortis : aussi l’amour va-t-il en s’approfondissant dans la mesure où ils se connaissent davan­tage. Contrairement à la règle ordinaire des mariages dans la société moderne, où seuls les sentiments d’amour précèdent le mariage, quitte à faire place ensuite aux plus graves déceptions l’union de Rébecca et d’Isaac ne reposa pas sur le mobile initial de l’amour.

Ils s’unirent dans une même volonté et se joignirent pour une même œuvre : la continuation de la maison d’Abraham. Et c’est alors seulement, après qu’Isaac l’eût prise comme femme. « qu’il l’aima ». Ainsi, l’amour représente l’aboutissement de l’expérience commune. Loin d’être le suprême but, le mariage n’est que le début d’une vie en commun qui donnera à l’amour un sens toujours plus profond et plus authentique (S.R. Hirsch)

Aussi longtemps que Sarah vivait, remarque Rachi une lumière était allumée d’une veille de Chabbat à l’autre veille de Chabbat, la bénédiction était dans la pâte (qu’elle pétrissait), une nuée était fixée au-dessus de la tente. Quand Sarah est morte, tout a cessé. Et quand Rébecca est venue, tout a repris.

Ces trois symptômes particuliers de la tente de Sarah correspondent aux trois principaux devoirs de la femme juive : celui d’allumer les lumières du Chabbat, celui de prélever la ‘Hala de la pâte, ce qui lui assure la bénédiction d’en haut. Enfin le devoir d’observance des lois de pureté de la vie conjugale. Elles attirent sur le foyer la présence et la protection de la majesté divine qui y plane invisiblement comme dans une colonne de «nuée fixée au-dessus de la tente».

(adapté à partir de La Voix de la Torah)

vayera

Parachat Vayéra 5775

   LA CIRCONCISION OU LA SPECIFICITE DE LA MISSION  D’ISRAËL

« Et D.ieu lui apparut [à Abraham] dans les plaines de Mamré… »

(Genèse 18, 1)

Rachi explique : «C’est lui, [ce même Mamré] qui avait donné conseil à Abraham [d’accomplir] la brit mila, la circoncision, et c’est pourquoi D.ieu apparut au patriarche dans son domaine. »

Pourquoi Abraham, avant la mila, éprouva-t-il le besoin de prendre conseil auprès de Mamré alors qu’il avait déjà reçu du Tout-Puissant l’ordre explicite d’accomplir cette mitsva ?

De fait, la circoncision allait marquer un véritable tournant dans l’existence du patriarche.

Le Midrach nous rapporte succinctement le dilemme auquel Abraham était confronté : « Tant que je n’ai pas pratiqué la circoncision dans ma chair, les hommes de tous les milieux entrent et sortent chez • moi, dit-il à D.ieu. Après la circoncision, tout le monde se détournera de moi. A cela, D.ieu répondit :

« A présent, c’est Moi et Ma suite qui viendrons te rendre visite ».

Depuis le début de son existence, Abraham s’était lancé seul et avec générosité dans la lutte pour faire connaître l’existence du D.ieu Unique à l’humanité idolâtre. Pour mener à bien sa mission, il s’était exilé, parcourant le pays en tous sens pour apporter la bonne parole à tous, sans exception. Il avait trouvé la compagne qui partageait ses idées et qui, de son côté, s’attachait à répandre parmi les femmes l’idéal monothéiste destiné à changer la face du monde.

« Abraham convertissait les hommes et Sarah convertissait les femmes » nous enseigne Rachi. Or, l’action d’Abraham était avant tout axée sur la bonté et la bienfaisance. Cela signifie qu’il était l’exemple vivant du dévouement total à autrui. Il s’efforçait d’aller au-devant des désirs de son prochain, de déceler tous ses besoins spirituels et matériels et de les satisfaire pleinement. De ce fait, il jouissait d’une immense popularité dans tout le pays. Et voilà que D.ieu lui demande de franchir une nouvelle étape dans sa mission : accomplir la circoncision.

La circoncision c’est par excellence l’accomplissement de la mitsva, d’un commandement de D.ieu dont la portée éthique et rationnelle nous échappe souvent. Cependant, nous l’observons avec la certitude, qu’émanant de D.ieu, cet ordre constitue nécessairement le Bien. Or Abraham est parfaitement conscient du fait qu’en pénétrant, par la circoncision, dans la sphère apparemment « irrationnelle » de la pratique religieuse, il prend le risque de se couper des disciples qu’il a formés. Du reste, le Midrach rapporte qu’effectivement, D.ieu accorda une protection particulière à Abraham qui réalisa la circoncision en « plein jour », au vu et au su de tous. Elle fut accomplie devant des personnes prêtes à s’opposer par la force à l’accomplissement de l’ordre du Très-Haut.

N’est-il pas singulier que nous soyons, nous Juifs, désignés par la Torah comme les descendants d’Isaac ainsi qu’il est dit : « Car c’est par Isaac que s’appellera ta descendance»? A la différence de tous les disciples d’Abraham et de Ismaël, Isaac est, par excellence, l’héritier spirituel d’Abraham « post-mila ». Cet héritage du premier Patriarche, ne saurait être simplement conçu comme la transmission des larges idées humanitaires et des principes monothéistes répandus par Abraham à travers le monde. Pour nous, éthique et pratique religieuse forment un Tout indivisible.

Quitte à nous heurter à l’incompréhension momentanée d’un monde enfermé dans un rationalisme étroit, nous sommes conscients que le message de D.ieu assumé dans son intégralité par le peuple d’Israël, sera un jour la Charte de l’Humanité.

(adapté à partir de IMRE COHEN)