LA CIRCONCISION OU LA SPECIFICITE DE LA MISSION D’ISRAËL
« Et D.ieu lui apparut [à Abraham] dans les plaines de Mamré… »
(Genèse 18, 1)
Rachi explique : «C’est lui, [ce même Mamré] qui avait donné conseil à Abraham [d’accomplir] la brit mila, la circoncision, et c’est pourquoi D.ieu apparut au patriarche dans son domaine. »
Pourquoi Abraham, avant la mila, éprouva-t-il le besoin de prendre conseil auprès de Mamré alors qu’il avait déjà reçu du Tout-Puissant l’ordre explicite d’accomplir cette mitsva ?
De fait, la circoncision allait marquer un véritable tournant dans l’existence du patriarche.
Le Midrach nous rapporte succinctement le dilemme auquel Abraham était confronté : « Tant que je n’ai pas pratiqué la circoncision dans ma chair, les hommes de tous les milieux entrent et sortent chez • moi, dit-il à D.ieu. Après la circoncision, tout le monde se détournera de moi. A cela, D.ieu répondit :
« A présent, c’est Moi et Ma suite qui viendrons te rendre visite ».
Depuis le début de son existence, Abraham s’était lancé seul et avec générosité dans la lutte pour faire connaître l’existence du D.ieu Unique à l’humanité idolâtre. Pour mener à bien sa mission, il s’était exilé, parcourant le pays en tous sens pour apporter la bonne parole à tous, sans exception. Il avait trouvé la compagne qui partageait ses idées et qui, de son côté, s’attachait à répandre parmi les femmes l’idéal monothéiste destiné à changer la face du monde.
« Abraham convertissait les hommes et Sarah convertissait les femmes » nous enseigne Rachi. Or, l’action d’Abraham était avant tout axée sur la bonté et la bienfaisance. Cela signifie qu’il était l’exemple vivant du dévouement total à autrui. Il s’efforçait d’aller au-devant des désirs de son prochain, de déceler tous ses besoins spirituels et matériels et de les satisfaire pleinement. De ce fait, il jouissait d’une immense popularité dans tout le pays. Et voilà que D.ieu lui demande de franchir une nouvelle étape dans sa mission : accomplir la circoncision.
La circoncision c’est par excellence l’accomplissement de la mitsva, d’un commandement de D.ieu dont la portée éthique et rationnelle nous échappe souvent. Cependant, nous l’observons avec la certitude, qu’émanant de D.ieu, cet ordre constitue nécessairement le Bien. Or Abraham est parfaitement conscient du fait qu’en pénétrant, par la circoncision, dans la sphère apparemment « irrationnelle » de la pratique religieuse, il prend le risque de se couper des disciples qu’il a formés. Du reste, le Midrach rapporte qu’effectivement, D.ieu accorda une protection particulière à Abraham qui réalisa la circoncision en « plein jour », au vu et au su de tous. Elle fut accomplie devant des personnes prêtes à s’opposer par la force à l’accomplissement de l’ordre du Très-Haut.
N’est-il pas singulier que nous soyons, nous Juifs, désignés par la Torah comme les descendants d’Isaac ainsi qu’il est dit : « Car c’est par Isaac que s’appellera ta descendance»? A la différence de tous les disciples d’Abraham et de Ismaël, Isaac est, par excellence, l’héritier spirituel d’Abraham « post-mila ». Cet héritage du premier Patriarche, ne saurait être simplement conçu comme la transmission des larges idées humanitaires et des principes monothéistes répandus par Abraham à travers le monde. Pour nous, éthique et pratique religieuse forment un Tout indivisible.
Quitte à nous heurter à l’incompréhension momentanée d’un monde enfermé dans un rationalisme étroit, nous sommes conscients que le message de D.ieu assumé dans son intégralité par le peuple d’Israël, sera un jour la Charte de l’Humanité.
(adapté à partir de IMRE COHEN)